Une pétition citoyenne a été lancée il y a un peu plus de deux mois sur le site Web de l’Assemblée nationale du Québec, qui demande au gouvernement de revoir ses plans du futur pont de l’Île-aux-Tourtes, afin d’y ajouter un espace pour le Réseau express métropolitain (REM). Ce scénario est toutefois peu envisageable, tant pour Québec que la Ville de Vaudreuil-Dorion.

Avec la construction du REM qui avance le long de l’autoroute 40 dans l’ouest de l’île de Montréal, et bientôt un terminus à Sainte-Anne-de-Bellevue, plusieurs citoyens se demandent pourquoi ne pas prolonger la ligne jusqu’à Vaudreuil-Dorion en passant sur le futur pont de l’Île-aux-Tourtes, qui est présentement à une étape de révision des plans et devis. 

« Je comprends les citoyens de dire tant qu’à faire, passer le REM dessus. Ça a l’air de la solution facile », indique Marie-Claude Nichols, députée de Vaudreuil qui parraine d’ailleurs la pétition. 

Elle précise toutefois que ce n’était pas le meilleur scénario envisagé par la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) infrastructure selon leurs études à l’époque où le Parti libéral avait lancé le projet. 

« La phase 2 Vaudreuil-Soulanges était desservie par le REM, non pas par le pont de l’Île-aux-Tourtes, mais plutôt par l’autoroute 20. Et c’était l’occasion en même temps de revoir la gare unique à L’Île-Perrot, c’est ce qui était prévu avec la CDPQ, rappelle Mme Nichols. On n’était pas allé plus loin en le faisant rentrer dans Vaudreuil-Dorion parce que nos municipalités n’étaient pas prêtes, dont Vaudreuil-Dorion. Il y a des coûts qui vont découler de ça. »

Prolongement du Réseau express métropolitain: Vaudreuil-Soulanges exclu du projet

La facture aux citoyens 

Le maire de Vaudreuil-Dorion, Guy Pilon, est clair. « On a aucun avantage à avoir le REM dans Vaudreuil-Soulanges pour une raison monétaire ».

Il explique que dans ce genre de projet, le municipal absorbe près de 40% du déficit, ce qui ferait automatiquement augmenter le compte de taxes des citoyens. « Vaudreuil-Soulanges va ramasser combien de millions en facture? Qui va payer? », questionne-t-il. 

Une hausse de la taxation est prévue pour les Villes touchées par ce projet. Montréal et les autres municipalités de l’île débourseront un total de 221 M$ pour des travaux liés au REM d'ici 2030 selon le plan d'immobilisation de la Ville de Montréal de décembre 2020.

Une redevance peut aussi perçue pour les nouvelles habitations à proximité ou encore une taxe à l'immatriculation de 50 dollars aux automibilistes des régions où le REM passera.

Sur ce point, Mme Nichols donne raison à Guy Pilon. « Le maire siège sur des comités en transport à la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), il voit les coûts. Les municipalités disent oui pour un projet, mais quand ils reçoivent la facture, ils trouvent ça moins drôle. Ils sont obligés d’augmenter les taxes de leurs citoyens », accorde-t-elle. 

La députée avoue que 40% lui semblent beaucoup à première vue, mais qu’il est certain que cela aura des répercussions sur le municipal. 

Un projet coûteux pour Vaudreuil

Les coûts du prolongement du REM sur le pont de l’Île-aux-Tourtes ou à côté sont jusqu’ici méconnus, mais selon M. Pilon, en se basant sur un ancien projet de train dans le secteur qui n’a jamais vu le jour, cela se chiffre en plusieurs centaines de millions de dollars.

« L’évaluation que l’Agence métropolitaine de Transport faisait dans le temps pour traverser ce cours d’eau, c’était trois quarts de milliard pour installer une voie ferrée. Je ne peux pas vous dire le REM combien ça coûterait pour traverser », indique-t-il.

M. Pilon rappelle qu’il faudrait aussi réaménager le petit tronçon routier entre la Ville et le pont de l’Île-aux-Tourtes afin qu’il accueille le REM, un détail important dans la planification et qui s'ajoute aux montants qui doivent être déboursés.

Ce serait aussi une question de choix pour le gouvernement et Vaudreuil n’est peut-être pas la première sur la liste, notamment après avoir dépensé près de 10 milliards de dollars pour un troisième lien à Québec selon le maire. « Est-ce que la priorité, ça va être dans les zones à forte densité comme Laval, Longueuil, la couronne nord? Ou ça va être de rejoindre à environ 1 milliard de dollars Vaudreuil pour 40 000 de population », fait-il remarquer.  

Rappelons que le REM, dans son entièreté, est maintenant évalué à près de 7,5 milliards de dollars.

Planifier la première phase

Même s'il ne se rendra pas pour l’instant jusqu’à Vaudreuil-Dorion, le maire dit cependant déjà se préparer à sa mise en fonction à Sainte-Anne-de-Bellevue.

« Ce qui est bien important, quand ils vont refaire le pont de l’Île-aux-Tourtes, c’est d’avoir une voie réservée aux autobus, et ça c’est prévu. Quand on va avoir ça, on va déjà être en affaires », assure-t-il. 

M. Pilon est d’avis que l’express 40 d’exo, entre la gare de Vaudreuil et le métro Côte-Vertu, n'aurait pu lieu d’être et que des navettes supplémentaires pourraient donc être ajoutées vers le terminus du REM, favorisant les aller-retour avec le centre-ville de Montréal.

Il faudra aussi du stationnement, beaucoup selon le maire. D’ailleurs, celui prévu à Sainte-Anne-de-Bellevue ne sera que de 200 places, contrairement aux 2000 espaces annoncés initialement. M. Pilon dit travailler sur ce dossier, quitte à élargir à nouveau celui de la gare de Vaudreuil pour venir répondre à la demande. 

Les horaires et l’emplacement des gares du train de banlieue pourraient être appelés à changer. M. Pilon parle entre autres d’avoir seulement une gare à Vaudreuil, même chose pour L’Île-Perrot et dans la région de Baie-d'Urfé, mais tout reste très hypothétique pour le moment. 

Une piste multifonctionnelle pour les vélos est finalement dans les plans pour le prochain pont, mais rien n’est encore déterminé sur comment elle rejoindra le reste du réseau cyclable.

Se faire entendre 

Bien qu’il faille oublier un REM à court terme dans la région, Mme Nichols parraine malgré tout la pétition pour faire entendre raison au gouvernement. « Ça ne veut pas dire que je suis à 100% d’accord avec le contenu, mais ça se passe chez nous et je respecte tous les citoyens, c’est mon devoir de les représenter à l’Assemblée nationale [...] Moi je ne cacherai pas que deux comtés en explosion démographique comme Vaudreuil et Soulanges, la nécessité d’un REM, elle est là », affirme-t-elle. 

La députée de Vaudreuil affirme qu’elle a pu devancer de deux ans l’échéancier des travaux de réfection de l'échangeur du chemin des Chenaux grâce à une pétition. « D’accord ou pas, on parle d’un REM pour Vaudreuil-Soulanges. C’est sûr que ça met une pression sur le gouvernement. J’invite les gens à aller la signer parce que ça va faire réfléchir le gouvernement sur les besoins des comtés en explosion démographique comme nous », explique-t-elle. 

Au moment où ces lignes étaient écrites, la pétition pour le REM, en ligne jusqu'au 7 septembre, avait 1627 signatures.

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