Impact de la loi 2 sur le système de santé
Le GMF Hudson fermera ses portes
La docteure Gabrielle Grégoire, médecin responsable du GMF de Hudson, a annoncé, en conférence de presse mercredi soir, la fermeture imminente de son centre médical. L'instabilité croissante et les enjeux financiers couplés au départ de plusieurs professionnels pour l’Ontario ont poussé à cette conclusion.
Dès le 1ᵉʳ avril 2026, soit au terme de son bail commercial actuel, le groupe de médecine de famille (GMF) de Hudson fermera définitivement ses portes, laissant sans médecin quelque 11 000 patients. « Malgré tous les efforts déployés pour maintenir nos activités et continuer d’offrir des soins à notre communauté, la clinique n’est plus financièrement viable comme entreprise », explique-t-on dans un communiqué publié mercredi soir par l’équipe du GMF. Cette clinique bilingue, la seule dans l’Ouest du Québec, est en fonction depuis 1978.
« Avec les difficultés financières qu'on entrevoit, on a décidé de fermer. Il n'y a aucun médecin qui soit prêt à s'engager pour une année supplémentaire. Chaque médecin de la clinique remet en question son choix de carrière ou son milieu pratique », partage avec beaucoup d’émotion Dre Grégoire.
Pour elle et ses collègues, la nouvelle loi 2 imposée par le gouvernement Legault force les professionnels de la santé à adopter des conditions de pratique inacceptables qui auront sans aucun doute un impact sur la qualité des soins prodigués aux patients.
En effet, de nombreux médecins ont critiqué le projet du gouvernement de la CAQ, soulignant que ce modèle privilégie la quantité plutôt que la qualité. « Accepter ça reviendrait à renoncer aux valeurs qui ont façonné notre clinique depuis le début : compassion, respect, sécurité et excellence des soins », témoigne l'équipe du GMF dans le même communiqué.
Rappelons que le 30 octobre dernier, dans la foule de cette opposition de la part des médecins et des spécialistes affiliés, Lionel Carmant, député de Taillon et proche de François Legault, a démissionné de ses fonctions de ministre responsable des Services sociaux pour siéger de manière indépendante. « Les dernières semaines ont été difficiles et m'amènent aujourd'hui à recentrer mes priorités. Je fais le choix de ma famille, la famille que nous avons construite, mon épouse et moi. » Monsieur Carmant, sa femme et sa fille sont tous les trois médecins de formation.
Où iront les médecins ?
Au cours des prochaines semaines, chaque patient recevra une communication distincte de son médecin de famille. Celui-ci précisera dans sa communication s’il poursuit ou non sa pratique, ainsi que les étapes à suivre pour la suite des choses. Chaque médecin du GMF prendra sa propre décision : celle qui est la plus appropriée pour lui et sa famille dans le contexte actuel.
Plusieurs ont déjà annoncé qu’ils quitteraient pour la retraite à la fin de l'année tandis que d’autres déménagent leur pratique en Ontario. Avec à peine une trentaine de kilomètres séparant le GMF Hudson de la frontière ontarienne, il n’est pas difficile de comprendre le choix de certains docteurs.
Les médecins pourraient aussi envisager une carrière dans l'enseignement. C’est d’ailleurs le cas de la Dre Tara McCarthy, présentement au GMF Hudson, qui reçoit couramment des offres de la part de l'Université McGill. Rien ne confirme qu’elle se dirigera dans cette direction, mais l’option est étudiée par plusieurs professionnels.
Un problème généralisé
Après 25 ans de pratique, le docteur Jean-Philippe Chouinard, médecin responsable du GMF Le Trait D'Union à Delson, dans la circonscription même du ministre de la Santé Christian Dubé, a annoncé lui aussi la fermeture de la clinique le 1ᵉʳ avril prochain.
« Moi aussi, je trouve ça très lourd à porter présentement, cette loi 2-là, parce que je me retrouve devant mon équipe qui a toujours voulu travailler pour améliorer les soins […]. Et là, la loi 2 va faire en sorte que, pour des raisons de survie opérationnelle, nous devrons fermer », explique le Dr. Chouinard.
Dans sa forme actuelle, la loi 2 prévoit un délai de paiement par rapport à la capitation qui fera forcément en sorte que certaines cliniques et médecins reçoivent, après parfois plusieurs mois d'attente, les montants nécessaires à faire vivre leur pratique. Pensons au coût du matériel médical, des ressources humaines, des loyers, etc. Les cliniques, qu'elles soient petites ou grosses, ne pourront pas supporter une charge financière aussi grande pendant aussi longtemps.
C’est entre autres pour ces raisons que, selon le Dr. Chouinard, la loi n’aura pas l’effet escompté en entraînant plutôt l’inverse de ce qu’elle prétend accomplir.
Soulignons que le Barreau du Québec a dénoncé la loi 2 puisqu'il estime qu’elle contribue à l'érosion de l’État de droit en établissant « un dangereux précédent pour la protection des libertés civiles ».

