Le quinquagénaire est le bénéficiaire d'un chien-guide de la Fondation MIRA
« Sa présence a changé ma vie», François Desrochers
Ce mardi 10 juin marque le lancement par L’Office des personnes handicapées du Québec de sa campagne de sensibilisation sous le thème « Les chiens d’assistance, des services essentiels. » Pour bien comprendre le rôle de ces toutous auprès des gens qui présentent des difficultés motrices ou une cécité, Néomédia est allé à la rencontre d’un bénéficiaire: François Desrochers, citoyen de Salaberry-de-Valleyfield.
Ce dernier peut compter, depuis près de trois ans, sur l’aide d’un chien-guide de la Fondation MIRA. Sa chienne, qu’on surnommera madame pour les besoins de ce texte, est un St-Pierre, soit un Labernois de seconde génération.
« Je l’ai eu le 14 octobre 2022 et ça a pris quelques années entre le moment où j’ai déposé la demande et où on a m’a remis le chien. Depuis son arrivée, ça a changé ma vie. C’était le bon moment pour moi, car avant ce moment, je n’étais pas rendu là dans la vie. Au cours des dernières années, ma vue a beaucoup baissé puisque je suis atteint de rétinite pigmentaire», confie-t-il d’entrée de jeu.
Pour les non-initiés, la rétinite pigmentaire est une maladie dégénérative qui est souvent héréditaire. « Elle cause une perte du champ visuel et la cécité. La maladie évolue de manière différente chez chacun en fonction, par exemple, des émotions qu’on vit . Dans mon cas, j’ai pu travailler et conduire jusqu’à 31 ans, en 1998, où j’ai dû arrêter. J’ai eu mon diagnostic au printemps de l’année 1999. Dans mon cas, la maladie vient de mon grand-père paternel. Je la compare souvent à un voyage de sable. S’il y a un trou dans la boîte du camion, tu vas perdre un peu de sable au départ. Puis, le trou va s’agrandir au fur et à mesure jusqu’à ne plus pouvoir transporter de sable. Aujourd’hui à 58 ans, je ne perçois que la lumière », image-t-il.
En couple, M. Desrochers peut compter sur le support de sa conjointe qui oeuvre dans le milieu de la santé pour les tâches ménagères à la maison. « Elle fait les commissions, le taxi pour les enfants, le ménage, l’entretien extérieur. Je peux en faire aussi, mais pas au même rythme. Tout est plus long pour moi.»
Une présence qui change une vie
Pour M. Desrochers, la présence de madame à ses côtés, change sa vie. « Avant, je me promenais avec une canne. J’avais honte, même si c’était pour ma sécurité. Je ne me sentais pas bien, car je savais que les gens me regardaient et je suis orgueilleux. Là, je suis fier quand je marche avec elle. Ma marche est plus fluide et je vais plus vite. Je suis moins craintif. Au début, il a fallu s’adapter. Elle n’avait pas d’expérience et moi non plus quand je l’ai eue », raconte-t-il en ajoutant que la paire marche entre 5 et 7 km par jour.
Lorsqu’il se déplace avec madame, celle-ci accomplit diverses tâches. Par exemple, elle guide M. Desrochers jusqu’à la porte extérieure du commerce. Une fois à l’intérieur, elle va l’emmener jusqu’au comptoir ou encore lui trouver une chaise et une table selon la volonté de ce dernier. Dans une salle d’attente, elle va lui indiquer l’emplacement d’une chaise vide. Même chose dans un parc si l’homme veut s’asseoir ou trouver une poubelle. S’ils marchent ensemble, madame fera un arrêt pour indiquer à M. Desrochers qu’une voiture est stationnée dans la rue, à proximité.
« À la maison, c’est un chien normal qui dort et qui mange. Je dois la nourrir, la sortir, la brosser, nettoyer ses oreilles et ses yeux. Bref, en prendre soin comme un chien. Ça demande beaucoup d’occupation. Quand elle a son harnais, elle sait qu’elle travaille et elle est heureuse de le faire. C’est vraiment un travail d’équipe. Elle peut faire des erreurs comme moi. Il faut s’ajuster. Ça va très bien depuis qu’on est ensemble.»
Par contre M. Desrochers tient à préciser un élément. S’il doit traverser une rue, madame va lui permettre d’atteindre l’intersection, mais il devra faire le travail pour traverser. « Elle distingue la gauche de la droite et peut avancer et reculer. Il est faux de penser qu’elle voit ou comprend les feux de circulation.C’est à moi de faire le travail pour traverser. Elle va rester là et attendre mes commandements pour repartir. Je dois me fier aux sons environnants. L’hiver, tout est plus difficile. Madame a moins de repères à cause des bancs de neige. Parfois les trottoirs sont moins déneigés aussi ou la charrue a passé en laissant une bordée de neige aux entrées des rues. Ça rend tout plus difficile. »
Et l’accessibilité dans tout ça?
Comment les commerçants réagissent-ils à la présence de l’animal dans leur établissement? « À date, je n’ai pas eu de refus. Certains m’ont posé des questions et un m’a demandé mon document attestant que j’ai un chien-guide de la Fondation MIRA, mais sinon, ça se passe bien. Normalement, quand ils voient le harnais, ils comprennent que le chien m’assiste dans mes déplacements. Je fréquente souvent les mêmes endroits, alors les entreprises sont habituées de nous voir. »
Sur le plan de la mobilité, M. Desrochers rencontre des difficultés en raison du peu de feux sonores présents sur le territoire municipal. « Il y en a sept ou huit que j’utilise régulièrement à Salaberry-de-Valleyfield. Parfois, ils brisent et ça prend du temps avant qu’ils ne soient réparés ou encore le haut-parleur n’est pas positionné du bon côté. Heureusement, j’ai de l’aide de l’Institut Nazareth-Louis-Braille pour m’aider dans mes déplacements et à identifier les problématiques pour que je puisse les contourner.»
Au quotidien, M. Desrochers a aussi l’aide de l’Institut national canadien pour les aveugles qui lui vient en aide sur le plan technologique en lui permettant l’accès à des appareils électroniques munis de logiciels facilitant pour sa situation.
Une mise à la retraite dans 5 ans pour madame
Madame a eu deux ans quand elle est arrivée chez M. Desrochers. Un chien-guide Mira accompagne les bénéficiaires jusqu’à l’âge de 10 ans, après quoi, il est considéré comme retraité. « Je vais en avoir un autre. Je ne peux pas le garder chez moi. C’est difficile, car le chien t’es dévoué Il est en amour avec toi. Pendant la première année, MIRA recommande qu’il ait des interactions qu’avec le bénéficiaire pour créer un lien solide avec lui. À sa retraire, je vais devoir la donner à quelqu’un. Je ne veux pas le laisser à quelqu’un que je recroiserais souvent. Ce n’est pas un choix évident. J’aime mieux ne pas y penser pour le moment. »
Si l’envie d’aller vers le toutou est trop forte quand on croise l’animal sur le trottoir, il n’est pas recommandé de le faire. « Il faut l’ignorer et ne pas interagir avec l’animal, car il porte son harnais, ce qui veut dire qu’il travaille. Dans la majorité des cas, les gens veulent le flatter ou lui donner une gâterie, des bonbons ou des biscuits. Il ne faut pas faire ça, car c’est dangereux et il pourrait perdre sa concentration. Les enfants ont souvent le réflexe de demander s’ils peuvent la flatter. C’est un combat de tous les jours», observe-t-il.
Et qu’en est-il des humains qui veulent parfois faire preuve de bienveillance? « Si on se croise sur le coin d’une rue et que vous me tendez le bras, je vais accepter avec plaisir pour traverser. Par contre, s’il vous plaît, si vous me tenez la porte dans un commerce, identifiiez-vous pour que je le sache et que je n’essaie pas de l’ouvrir pendant cinq minutes.»
Pour briser l’isolement, M. Desrochers est membre du groupe Facebook Ensemble, on est seuls avec nos cannes blanches. « On a un groupe Messenger qui compte des membres de partout au Québec. On s’appelle souvent pour échanger des trucs ou simplement jaser. Ça nous fait sortir de la solitude. Il y a beaucoup de membres qui sont célibataires et qui ont un faible revenu. On vit tous les mêmes enjeux alors parfois ça fait du bien d’en jaser», conclut-il.
À lire également:
- MIC+: une certification municipale pour rendre nos milieux de vie plus inclusifs
- La Ville de Hudson se prépare à accueillir sa première Fierté LGBTQ2+
- Marco Pilon reconnu par la COMAQ pour son engagement professionnel
Pour partager votre opinion vous devez être connecté.