Projet de construction dans la montagne de Rigaud
« Malheureusement, la Ville justifie le projet de construction en se basant sur cette étude que personne ne peut consulter. » - David Hill.
« Je trouve antidémocratique qu’un projet aussi important et mobilisateur comme celui-ci soit mis en branle, en pleine pandémie alors que les gens ont d’autres préoccupations », souligne David Hill, l’instigateur de la pétition contre un projet de construction d’une résidence unifamiliale sur la montagne de Rigaud.
Depuis plusieurs semaines, de nombreux citoyens ont laissé entendre leur mécontentement face à une nouvelle construction sur le chemin St-Georges.
Afin de faire entendre raison aux autorités, un résident de Saint-Lazare et grand usager des sentiers de la montagne, David Hill, a lancé une pétition demandant à tous les paliers de gouvernement pouvant faire stopper projet du 356 St-Georges, de le faire dès maintenant. Lancée le 24 octobre, la pétition (qui est disponible ici change.org/p/save-rigaud-mountain) compte plus de 11 400 signatures.
« Ça fait plusieurs années que j’ai remarqué, en skiant dans les sentiers de la montagne, que les maisons se rapprochent de plus en plus des sentiers. Je trouve vraiment déplorable de voir tout cela, considérant que la forêt sur la montagne est unique et surtout l’une des dernières d’une telle envergure dans la région du grand Montréal », indique M. Hill.
De son côté, la Ville tient à préciser, que dans le dossier du 356 St-Georges, aucun sentier pédestre n’a été condamné pour la construction de la demeure. « Il y a deux sentiers qui passent directement sur le terrain en question et ils sont toujours accessibles. Les gens qui souhaitent se promener peuvent toujours le faire », indique Simon St-Michel, directeur des communications, à la Ville de Rigaud.
M. St-Michel ajoute également que deux sentiers de roc et de roches menaient au terrain. « Pour faire le chemin qui mène au site de construction, il n’y a pas d’abattage de millions d’arbres, le sol est de roche. De plus, il est facilement possible de contourner le chemin en empruntant un autre sentier pédestre », ajoute-t-il.
Des études qui font sourciller
Des études antérieures à 2016 ont été menées par des firmes expertes et externes dont Hémisphère et WSP et ont permis d’établir la caractérisation des sols.
Cinq valeurs aux terrains du mont Rigaud ont été déterminées : très faible, faible, moyenne, élevée et très élevée. Le Règlement de contrôle intérimaire (RCI) de 2016, adopté par la MRC de Vaudreuil-Soulanges, s’est fait en se basant sur ces études.
Selon le RCI adopté en 2016 et modifié une première fois en juin 2017, le lot du 356, chemin St-Georges avait alors été caractérisé comme étant à valeur écologique élevée.
Une nouvelle étude datant de 2017, effectuée cette fois par la firme Grebe Inc. a détaillé de façon plus précise, la valeur du lot du chemin St-Georges. « Celle-ci va plus en détail en précisant que la plupart des zones du lot en question sont de valeurs écologiques élevées, sauf une zone du lot, qui elle, est de faible valeur écologique », précise M. St-Michel qui indique également que cette nouvelle étude n’a pas été mandatée par la Ville, ni par le propriétaire actuel du terrain.
Selon ce que Néomédia a été en mesure d’apprendre, l’étude de 2017 aurait possiblement été commandée par l’ancien propriétaire.
« Ça ne fait aucun sens à mes yeux qu’en 2016, le lot est de valeur écologique élevée, mais qu’en 2017, une nouvelle étude indique qu’une portion de cette même parcelle de terre soit à faible valeur écologique. Comment peuvent-ils croire que de dynamiter ou couper des arbres sur une partie du terrain n’aura pas d’effet sur le reste du lot? C’est illogique », s’indigne David Hill.
Il aura fallu trois ans, avant que la MRC puisse apporter les changements à son RCI pour que celui-ce reflète les données de l’étude de la firme Grebe Inc.
« Le délai de 3 ans s’explique par le fait qu’il y avait des recours judiciaires et que la MRC ne pouvait aller de l’avant avec ces modifications tant que le recours judiciaire était actif. La situation s’est résorbée en avril dernier lors d’une entente hors cour », explique Simon St-Michel.
« Malheureusement, la Ville justifie le projet de construction en se basant sur cette étude que personne ne peut consulter. Ça ne fait aucun sens », ajoute M. Hill. Puisque l'étude n'a pas été mandatée par la Ville, mais bien par un particulier, celle-ci étant de nature privée, elle ne peut être rendue publique.
Deux amendements plutôt qu’un
En mai et octobre 2020, la MRC de Vaudreuil-Soulanges a été en mesure d’apporter les changements nécessaires à son RCI. Il est important de spécifier que la Ville ne peut pas faire changer la valeur d’un terrain. Uniquement la MRC a ce pouvoir, accompagné de ses 23 municipalités.
Dans un premier temps, dix lots ont été partiellement exclus du règlement de contrôle intérimaire. En d’autres mots, la règlementation en vigueur ne s’applique plus sur certaines portions desdits lots et par conséquent, il est maintenant possible d’y construire un maximum d’un bâtiment. Ceci étant dit, certaines conditions sont à respecter.
En octobre 2020, deux nouveaux lots ont été partiellement exclus et sont désormais soumis aux mêmes critères que les dix premiers.
Un nouveau propriétaire entre en jeu
Une fois le recours judiciaire conclu, dans les derniers mois, les propriétaires actuels du lot du 356, chemin St-Georges, ont fait l’acquisition de celui-ci.
C’est également cette année qu’ils ont déposé une demande de permis pour la construction d’une résidence unifamiliale sur cette zone de faible valeur écologique, alors que tout le reste du lot est de haute valeur écologique.
En vertu de la Loi sur les organismes publics et les renseignements personnels, la Ville ne peut préciser la date à laquelle le permis de construction a été demandé. Est-ce avant les changements de mai et octobre 2020 ? Pour l’instant, il est impossible de la savoir. « Cependant, je peux vous confirmer que le propriétaire actuel du terrain a acquis le terrain en 2020 », indique Simon St-Michel de la Ville de Rigaud. « Comme la demande était légale, conforme et que le lieu de la construction de la maison se trouvait dans une zone à faible valeur écologique, le permis a été octroyé », ajoute-t-il.
Lors de la séance du conseil du 10 novembre dernier, le maire de Rigaud, M. Hans Gruenwald Jr. a indiqué : « Le ministère de l’Environnement et la MRC de Vaudreuil-Soulanges se sont rendus sur place et ont jugé qu’aucune infraction n’avait été commise. »
« Plusieurs villes font appel au ministère de l’Environnement dans des cas comme celui-ci. Je m’explique mal comment un ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques peut-il accepter des projets de développement comme celui-ci? Peut-être serait-il temps que le ministère change de nom pour celui du ministère du Développement », s’indigne David Hill.
Protéger le patrimoine naturel de la montagne
Est-ce qu’un de construction comme celui au coeur du débat ouvre la porte à plus de développement sur la montagne ? « Tant que les projets présentés sont conformes et légaux, la Ville n’a malheureusement pas le choix de les accepter. Il existe toutefois une solution plutôt simple pour protéger la montagne et c’est de s’impliquer au sein de la Fiducie de conservation du patrimoine naturel de Rigaud », de dire M. St-Michel.
En janvier 2017, la procureure Me Johanne Brassard a été mandaté par la Ville et la MRC afin d’aider à identifier la structure que la Ville devait mettre en place pour que les terrains qu’elle allait acquérir puissent être protégés à perpétuité.
C’est ainsi qu’est née la Fiducie de conservation du patrimoine naturel de Rigaud. Il s’agit d’un organisme de bienfaisance qui recueille les dons et l’argent en échange de reçus fiscaux.
« Tant qu’elle en a les moyens, la fiducie achète les terrains encore libres ce qui permet de les protéger de tout développement, et ce, à perpétuité. Il y a un beau mouvement de mobilisation en ce moment, mais si celui-ci était orienté vers le gouvernement provincial pour qu’il donne les moyens à fiducie d’acheter tous les terrains de libres sur la montagne, elle le fera. Ainsi tout le monde serait gagnant », poursuit Simon St-Michel.
« J’aimerais sincèrement que ce projet soit stoppé et qu’un moratoire soit mis en place pour protéger la montagne de Rigaud de tout développement », conclut David Hill qui ajoute que des discussions sont en cours afin de savoir quels sont les recours des citoyens pour faire arrêter le projet et éviter que d’autres soient acceptés.
6 commentaires
Pour partager votre opinion vous devez être connecté.
gne de Rigaud de tout développement ...
À date, la MRC a amendé à deux reprises son RCI pour exclure 12 lots situés sur la montagne, facilitant finalement la construction sur chacun de ces lots. Un propriétaire n'a qu'à se tourner vers la firme Gerbe, demander une nouvelle étude de sol pour faire classer sont lot comme ayant une faible valeur écologique, et hop, le tour est joué... Je ne peux pas croire que ce soit si facile de déclasser une étude sérieuse qui a été mené seulement quelques années avant (par Hémisphère) et sur laquelle la ville de Rigaud et la MRC se sont basées pour écrire des règlements d'urbanisme et de zonage importants. Rien n'a changé dans la montagne de Rigaud durant ces années, alors pourquoi la valeur écologique aurait-elle changé subitement ? La logique n’opère pas ici, et c'est épeurant de voir comment on peut si facilement déjouer les dispositions.
Nous devons absolument mettre en place de mécanismes qui assurent une protection à perpétuité ; un parc régional, des règlements plus strictes limitant la construction sur les propriétés de cette zone à une bande de développement contrainte au bord de route. Si nous n'agissons pas maintenaient pour durablement protéger la montagne, demain il sera trop tard.