Québec doit revoir ses cibles climatiques à la hausse et créer des budgets carbone

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Par La Presse Canadienne, 2025
MONTRÉAL — Le Comité consultatif sur les changements climatiques avise le gouvernement que devant l’ampleur de la crise climatique, le Québec «ne peut pas se permettre de reculer en réaction à des circonstances conjoncturelles» et doit adopter une cible de réduction des GES de 85 % pour 2050, et de conserver, au minimum, celle de 37,5 % par rapport au niveau de 1990.
Ce sont deux des onze recommandations qui figurent dans le huitième avis du Comité consultatif sur les changements climatiques remis au ministre de l’Environnement, Bernard Drainville, qui doit bientôt présenter les nouvelles cibles climatiques du Québec.
L’avis, demandé par le gouvernement Legault, comprend également la mise en place de budgets carbone quinquennaux.
Se situer «du bon côté de l’histoire»
La lutte au changement climatique ne doit pas être tributaire du contexte géopolitique, met en garde le comité scientifique principal qui conseille le gouvernement en matière de changements climatiques.
«Les sociétés humaines devront inévitablement réussir cette transition, la société québécoise doit continuer à avancer et progresser de façon cohérente et lucide en suivant une trajectoire crédible, ambitieuse et structurante, lui permettant de se situer du bon côté de l’histoire, de la science et de l’économie», peut-on lire dans l’avis d’une soixantaine de pages publié mardi matin.
Réviser la cible
L’avis, un document d’une soixantaine de pages dont le titre est «Définir l’ambition climatique du Québec: cibles et trajectoires de décarbonation», mentionne que, conformément à l’article 46.4 de la Loi sur la qualité de l’environnement, «la cible de réduction des émissions pour 2030 ne doit pas être inférieure à 37,5%» et qu’elle devrait même être revue à la hausse et qu’idéalement, elle devrait atteindre 45 % de réduction de GES d’ici 2030 par rapport au niveau de 1990.
Le comité de scientifiques nommés par le gouvernement de François Legault propose aussi «des cibles intermédiaires de réduction des émissions nettes de 60 % en 2035 et de 78 % en 2040».
Québec devrait viser la carboneutralité dès 2045 «en combinant une cible de réduction des émissions de 85 % par rapport au niveau de 1990 et une cible de séquestration permanente des émissions résiduelles équivalant à 15 %».
Intégrer graduellement la séquestration du carbone
Selon la spécialiste des sols forestiers Évelyne Thiffault, l’une des membres du comité, «le secteur des terres et forêts est une source nette de GES et il ne dispose pas encore de cible de réduction, il faut remédier à cette situation. Il faut également distinguer et utiliser adéquatement la séquestration naturelle, plus temporaire, de la séquestration géologique, plus permanente, mais encore en développement».
Des budgets carbone quinquennaux
Les scientifiques suggèrent aussi de mettre en place «des budgets carbone et des feuilles de route sectorielles pour mieux baliser la trajectoire de décarbonation et accroître la mobilisation des parties prenantes».
En règle générale, un budget carbone définit le nombre d’émissions liées au carbone cumulé autorisées dans un certain laps de temps, par exemple, sur cinq ans.
Donc, le gouvernement offrirait une feuille de route ou une trajectoire, pour indiquer les limites d’émissions de carbone que chaque grand secteur de l’économie devrait respecter.
L’avis souligne que ce type d’outil, «largement utilisé à l’international», permettrait de planifier de façon efficiente les transformations dans le transport, l’industrie, le bâtiment et l’agriculture, ainsi que dans le secteur des terres et forêts.
Le gouvernement Legault est sur le point de faire une «révision officielle» des cibles climatiques québécoises.
«Cet avis propose une vision cohérente: faire de la décarbonation et de la résilience climatique un véritable projet de société, porteur d’innovation technologique et sociale, de prospérité et d’équité. Notre intention est donc d’alimenter un dialogue ouvert et informé avec tous les acteurs de la société québécoise afin de favoriser l’adoption collective d’objectifs ambitieux balisant une trajectoire de décarbonation à la hauteur de l’urgence climatique et de l’aspiration de la société québécoise», a écrit Alain Webster, président du Comité.
Stéphane Blais, La Presse Canadienne