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McGill: une découverte pourrait prédire l'efficacité de la chimiothérapie

durée 11h58
9 septembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

MONTRÉAL — Des travaux réalisés au Centre universitaire de santé McGill pourraient bientôt permettre de prédire si un patient répondra ou non à un traitement de chimiothérapie avant son administration.

Cette percée pourrait éviter à certains patients des traitements inutiles et faire progresser encore un peu plus ce qu'on appelle la «médecine personnalisée» ou la «médecine de précision».

«On crée essentiellement un avatar du patient et on teste toute une série de médicaments sur cet avatar pour déterminer lesquels fonctionnent», a résumé le docteur Lorenzo Ferri, qui dirige la division de chirurgie thoracique et gastro-intestinale supérieure au CUSM et est scientifique senior au sein du Programme de recherche sur le cancer à L’Institut.

Les détails de la percée réalisée par le docteur Ferri et ses collègues de l'Université Harvard sont effectivement incompréhensibles pour le commun des mortels. Il suffira donc de dire qu'ils ont développé un petit dispositif qu'ils appellent «un organe sur puce» qui reproduit non seulement le cancer du patient, mais aussi ― pour la première fois ― les tissus environnants, ce qui permet de prédire sa réaction au traitement.

Le procédé a été testé auprès de huit patients traités au CUSM pour un adénocarcinome de l’œsophage, un cancer ayant un taux de mortalité très élevé. Toutes les puces ont prédit avec précision la réponse à la chimiothérapie: celle-ci a entraîné la mort des cellules cancéreuses dans quatre puces, tandis que dans les quatre autres, les cellules ont survécu au traitement.

Ces résultats correspondaient «parfaitement» aux réponses observées chez les patients ayant reçu la même chimiothérapie ainsi qu’à leurs taux de survie après la résection chirurgicale de leur tumeur, a-t-on indiqué par voie de communiqué.

«On peut vraiment reproduire ce qui se produit dans la tumeur du patient, à l'extérieur, sur une puce, en laboratoire, a dit le docteur Ferri. On peut prédire ce qui va fonctionner avant de l'administrer, on peut prédire l'efficacité et éviter une toxicité (inutile).»

Dans le contexte actuel, a dit le docteur Ferri, on procède essentiellement par «essai-erreur»: après une biopsie, on essaie une molécule qui, dans le meilleur des cas, fonctionnera pour environ la moitié des patients.

«Malheureusement, chez certains patients, cela n'a pas fonctionné, a-t-il dit. Ce patient a donc reçu pendant trois mois une chimiothérapie toxique qui provoque de nombreux symptômes, mais qui n'a aucun effet. Non seulement vous avez perdu du temps, mais cela a également causé des dommages à cette personne.»

Et même la «médecine de précision» dont on parle tant comporte toujours une bonne partie d'«essai-erreur», rappelle-t-il. Avec cette découverte, ses collègues et lui mettent de l'avant un «nouveau concept» qu'ils appellent «oncologie fonctionnelle de précision».

«On passe de l'oncologie de précision à l'oncologie fonctionnelle de précision, a dit le docteur Ferri. On teste les molécules à l'extérieur du corps sur quelque chose qui ressemble exactement à la tumeur du patient.»

Depuis presque un siècle, a-t-il ajouté, on teste des molécules à l'extérieur du corps, par exemple pour évaluer leur efficacité à combattre une infection ― un concept qui n'existait pas dans la lutte contre le cancer «parce que nous ne disposions pas des bons outils», a-t-il souligné.

L'organe sur puce «nous donne (...) l'environnement complet (de la tumeur)», a-t-il dit.

«La puce organique nous permet de recréer tous les éléments, le flux, les interfaces mécaniques tissulaires entre les cellules structurelles et les cellules cancéreuses proprement dites, elle nous permet d'utiliser des cellules immunitaires et, surtout, nous pouvons administrer la chimiothérapie que le patient reçoit, à la concentration et au moment exacts», a-t-il énuméré.

Le docteur Ferri espère démarrer un essai clinique au courant de la prochaine année, pour offrir aux patients les traitements oncologiques les plus prometteurs et éviter les dommages attribuables à des options de traitement inefficaces.

Avec son équipe, il travaille également à adapter la puce à d’autres types de tumeurs pour lesquelles la chimiothérapie est largement utilisée, mais pas toujours efficace, comme le cancer de l’estomac, le cancer du poumon et le mésothéliome.

Le procédé pourrait enfin être un jour utilisé pour tester l'efficacité de nouvelles molécules, ou de molécules approuvées pour d'autres indications, sans devoir procéder à des essais précliniques.

Les conclusions de cette étude ont été publiées par le Journal of Translational Medicine.

Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne

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