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Les provinces ont recours trop vite à la clause dérogatoire, selon Jean Chrétien

durée 07h03
6 novembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

TORONTO — Les provinces ont recours trop vite à la clause dérogatoire pour des «raisons marginales» et ont perdu de vue son objectif initial, selon l'ancien premier ministre Jean Chrétien.

En tant que ministre de la Justice, en 1981, M. Chrétien a négocié l'inclusion de cette clause dans la Charte canadienne des droits et libertés. Quarante ans plus tard, il estime que les provinces utilisent la disposition pour «n'importe quoi».

«Elle n'a pas été conçue pour ça. Elle a été conçue pour permettre aux politiciens d'intervenir lorsqu'un tribunal va trop loin», a-t-il tranché mercredi soir lors d'un événement organisé à Toronto par Journalists for Human Rights.

«Ça m'inquiète beaucoup.»

La clause dérogatoire permet aux parlements de passer outre certaines parties de la Charte canadienne des droits et libertés pendant une période maximale de cinq ans.

Récemment, l'Alberta a invoqué cette clause pour forcer le retour au travail de ses enseignants en grève. Le Québec, l'Ontario et la Saskatchewan l'ont également utilisée dans les dernières années.

M. Chrétien n'a toutefois pas cité d'exemples précis.

Lors de son allocution, l'ancien premier ministre a également fait part de ses préoccupations concernant l'état de la démocratie dans le monde, en particulier aux États-Unis.

Selon M. Chrétien, la décision du président Donald Trump de déployer des soldats de la Garde nationale dans plusieurs grandes villes américaines pour réprimer des manifestations est un «très mauvais signe».

M. Chrétien, qui est âgé de 91 ans, a noté qu'il n'appelle pas les premiers ministres pour leur donner des conseils, car il ne veut pas être un «quart-arrière du lundi matin».

Cependant, lorsqu'on lui a demandé comment il réagirait aux droits de douane imposés par l'administration Trump et aux menaces d'annexion du président, il a répondu que le Canada devait se mobiliser.

Faisant allusion au gouvernement actuel du premier ministre Mark Carney, M. Chrétien a déclaré: «Je suis très satisfait de la situation actuelle.»

Retour sur 1995

Mercredi matin, l'ancien premier ministre a déjeuné avec l'ancien président américain Bill Clinton. Selon M. Chrétien, M. Clinton était de bonne humeur après la victoire des démocrates lors des élections de mardi, notamment l'élection de Zohran Mamdani à la mairie de New York.

M. Chrétien considère aussi ces résultats comme un signe positif indiquant que les Américains s'intéressent à ce qui se passe.

Lors de sa conversation avec l'ancienne présentatrice de CTV Lisa Laflamme, l'ancien premier ministre a rappelé comment M. Clinton avait soutenu l'unité canadienne à l'époque du référendum de 1995, dont on vient de souligner le 30e anniversaire.

Il est aussi revenu sur la nuit où il a été la cible d'une tentative d'assassinat, le 5 novembre 1995.

«Au milieu de la nuit, ma femme m'a dit: "Il y a un inconnu dans la maison"», a mentionné M. Chrétien. Elle a décrit l'homme comme portant une tuque et des gants, «ressemblant à Forrest Gump».

L'homme, qui a ensuite été reconnu coupable de tentative de meurtre, mais non responsable criminellement en raison d'un trouble mental, avait réussi à franchir la sécurité du 24, promenade Sussex, la résidence officielle du premier ministre à Ottawa.

M. Chrétien et sa femme, Aline, ont verrouillé la porte et sont restés ensemble, armés d'une statue, jusqu'à l'arrivée de la police. Selon M. Chrétien, sa femme lui a sauvé la vie.

«Elle a eu une grande influence sur moi. C'était un très, très bon partenariat», a-t-il souligné.

L'importance des relations

M. Chrétien a affirmé à Mme LaFlamme qu'il attribuait à Aline, décédée en septembre 2020, le mérite d'avoir empêché le Canada de participer à la guerre en Irak lorsqu'elle a éclaté, en 2003.

«C'est grâce à elle», a-t-il confirmé, expliquant que c'est sa femme qui l'avait convaincu de se présenter pour un troisième mandat de premier ministre.

À son avis, les autres candidats auraient cédé à l'immense pression exercée par les États-Unis pour que le Canada se joigne à leur campagne.

S'appuyant sur sa longue mémoire des relations géopolitiques, M. Chrétien estime que le Canada a perdu du terrain sur la scène internationale.

À ce stade, qu'il a qualifié de «déclin de l'empire américain», il est important de rétablir les relations à travers le monde, a-t-il fait valoir.

Cassidy McMackon, La Presse Canadienne

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