Nous joindre
X
Rechercher
Publicité

Les besoins en soutien aux aînés vont exploser, la crise est déjà à nos portes

durée 06h00
25 novembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
durée

Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

MONTRÉAL — Les ressources actuelles ne sont pas assez nombreuses pour répondre aux besoins des aînés. D'ici 2035, 111 000 personnes âgées de plus risquent de ne pas avoir les services à domicile ou un milieu de vie adaptés pour elles. L'Alliance québécoise des milieux de vie pour aînés (AQMVA) sonne l'alarme et appelle les décideurs à agir avant de frapper un mur.

Il s'agit d'un «net déséquilibre» entre la hausse de la demande et l’offre du réseau public, dénonce l'AQMVA, qui représente 86 % de l’hébergement aux aînés au Québec, autant pour les soins à domicile, en CHSLD, en résidences privées pour aînés (RPA) ou en ressources intermédiaires.

L'AQMVA a mandaté la firme Aviseo Conseil pour réaliser une prévision sur dix ans de la demande des besoins en matière de soutien et d’assistance pour les aînés. Le rapport publié mardi dresse un portrait alarmant.

Le nombre d’aînés ayant besoin de soutien à l’autonomie passera de 289 000 en 2025 à 400 000 en 2035, soit une hausse de 38 %. Le soutien à l'autonomie comprend par exemple l'aide à sortir du lit, la toilette partielle ou complète, l'encadrement de la prise de médicament, etc. Ce soutien peut s'effectuer à domicile, mais aussi dans d'autres milieux, comme les résidences.

Selon les prévisions, dans dix ans, 70 % de la demande concernera le soutien à domicile, et la demande en CHSLD bondira de plus de 50 %. D'ici 2040, 40 000 nouvelles places en CHSLD seront nécessaires pour répondre aux besoins.

Des régions plus touchées que d'autres

Plus de la moitié de la hausse en soutien à domicile se concentrerait en Montérégie, à Montréal, dans les Laurentides et la Capitale-Nationale. À elles seules, ces quatre régions représentent près de 50 % de la croissance totale lorsqu'on combine leur poids démographique et le vieillissement de leur population.

Carl Veilleux, président du conseil d'administration de l'Association des ressources intermédiaires d'hébergement du Québec (ARIHQ), se demande quelle est la vision du gouvernement pour les prochaines années au Québec.

Il met de l'avant des statistiques qui parlent d'elles-mêmes. Depuis 2018, 700 RPA ont fermé leurs portes, «essentiellement pour des raisons financières», selon M. Veilleux. De plus, depuis 2020, 72 % des appels d'offres en ressources intermédiaires n'ont pas trouvé preneur «parce que les conditions de financement ne sont pas adéquates aux réalités du marché».

«On vieillit tous, mais il y a certaines régions qui vont être sous une plus grande pression que d'autres. [...] En termes de CHSLD, de ressources intermédiaires, et des résidences privées pour aînés (RPA) également, il faut que ça cesse de fermer. Il faut continuer de développer et maintenir les services, ça c'est incontournable», soulève M. Veilleux.

Déjà, 25 000 aînés n'ont pas les soins et services dont ils ont besoin. Plus précisément, 3500 aînés sont en attente d'une place en CHSLD et 17 800 aînés attendent un premier service en soins à domicile, selon les données du tableau de bord du ministère de la Santé. À cela s'ajoutent les chiffres de l'ARIHQ selon lesquels 5500 personnes sont en attente d'une place en ressources intermédiaires.

Ces personnes errent dans le réseau. Soit qu'elles se retrouvent hospitalisées en attendant une place en CHSLD qui ne se concrétisera peut-être jamais pour elles, soit que des proches aidants s'épuisent à s'occuper d'elles.

«Il y a des cas qui sont hébergés en ressources intermédiaires qui devraient normalement être localisés vers des CHSLD, mais faute de place, on les maintient en ressource intermédiaires, expose M. Veilleux. Les équipes sur place ne sont pas toujours équipées pour bien encadrer ces clientèles plus lourdes. Donc, ça met une pression sur l'équipe, [...] ça a aussi un effet sur tous les autres résidents qui cohabitent avec cette personne, parce que peut-être la personne se désorganise, elle a de gros problèmes comportementaux, donc elle n'est plus à sa place et elle désorganise le milieu de vie.»

Ce genre de cas embourbe aussi les services des premiers répondants qui doivent intervenir dans des milieux de soins, «alors qu'ils ne devraient pas», commente M. Veilleux.

«La sonnette sonne plus fort que jamais»

À l’heure actuelle, seules 127 nouvelles places en maisons des aînés seront disponibles dans les prochaines années, selon le tableau de bord du ministère. Une «hausse marginale en comparaison à la hausse prévue des besoins», exprime l'AQMVA.

Le rapport indique que les besoins et les coûts pour le soutien à l’autonomie des personnes âgées quadrupleront, passant de 6,2 milliards $ en 2020 à 25,6 milliards en 2050. «Cette pression financière majeure sur l'État québécois exige une réforme urgente privilégiant les soins à domicile moins coûteux», peut-on lire dans le rapport.

«On vient réaffirmer un constat qu'ont savait déjà. Je pense que la sonnette d'alarme pour nous, elle sonne plus fort que jamais. On est définitivement devant une crise des services de soutien d'assistance aux aînés, avec 25 000 personnes aujourd'hui qui n'ont pas leurs services. Je pense qu'on est déjà dedans, puis la crise ne va que s'accentuer au cours des prochaines années», prévient M. Veilleux.

«Même dans le scénario optimiste, on ne va pas être en mesure de répondre aux besoins de nos aînés, donc il est absolument impératif qu'on se mobilise rapidement pour travailler différemment, tout le monde ensemble, dans le but de traverser cette crise», dit-il.

M. Veilleux demande à la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, Sonia Bélanger, de s'asseoir avec l'AQMVA pour appliquer des solutions.

La couverture en santé de La Presse Canadienne est soutenue par un partenariat avec l'Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est seule responsable de ce contenu journalistique.

Katrine Desautels, La Presse Canadienne

app-store-badge google-play-badge