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Le plan stratégique 2025-30 de CBC/SRC prévoit des partenariats avec d'autres médias

durée 04h30
15 octobre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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Temps de lecture   :  

5 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

MONTRÉAL — Radio-Canada se donne comme mission d’établir au cours des cinq prochaines années des partenariats avec des médias privés et communautaires pour renforcer l’écosystème médiatique, d’aller rejoindre les auditoires qui lui échappent au profit des plateformes numériques en investissant davantage celles-ci et d’élargir sa présence en région.

Ce sont là certains des axes forts de la Stratégie 2025-2030 de CBC/Radio-Canada qui sera dévoilée le 28 octobre prochain, que La Presse Canadienne a obtenue en primeur.

À plusieurs reprises dans le document d’une dizaine de pages, il est fait mention du rôle «rassembleur» que doit jouer la société d’État dans un environnement médiatique fragilisé par les plateformes numériques étrangères, où les contenus canadiens sont marginalisés.

Partenariats avec les autres médias

La stratégie insiste sur «le rôle de pilier» que doit jouer CBC/Radio-Canada, affirmant qu’elle doit «en priorité démontrer un esprit de collaboration, nouer des partenariats avec des médias privés et communautaires, soutenir un écosystème fragile». Soulignant sa valeur publique, CBC/Radio-Canada «devrait faire office de pollinisateur, avoir une présence qui aide l’industrie», souligne-t-on, ajoutant qu’elle doit «en faire plus pour renforcer et soutenir les secteurs de l’écosystème des médias publics et communautaires qui sont en difficulté. Autrement, la pluralité des voix disparaîtra», avertit-elle.

Elle entend par exemple «offrir la couverture médiatique de CBC/Radio-Canada aux partenaires de l’industrie, afin de réduire leurs coûts de couverture des événements majeurs». Constamment, dans le document, peut-on sentir une volonté de «faire passer la collaboration avant la concurrence, pour nourrir et mettre en commun l’innovation afin de stimuler la vitalité de notre écosystème médiatique».

L’idée est audacieuse dans un contexte de concurrence féroce où ses grands compétiteurs privés ont davantage tendance à démoniser la société d’État qu’à chercher à tisser des liens, notamment à cause du soutien financier qu’elle reçoit du gouvernement fédéral et de la compétition qu’elle leur livre pour les dollars publicitaires. Il en va tout autrement des plus petits médias privés qui en arrachent et qui tendront sans doute l’oreille à toute offre de partenariat et on peut aussi présumer qu’un soutien radio-canadien aux médias communautaires serait fort bien accueilli, ceux-ci ayant souvent du mal à se maintenir à flot.

Rejoindre les jeunes

Radio-Canada reconnaît que l’ère numérique lui pose de nouveaux défis, au premier chef de rejoindre des segments de population qui la boudent, en l’occurrence les enfants et les jeunes, les nouveaux arrivants et ce qu’elle appelle les «non-utilisateurs ou les voix critiques». «Pour démontrer qu’elle est essentielle, la Société doit changer rapidement d’approche et accorder la priorité aux segments d’auditoire cruciaux pour contribuer à assurer l’avenir d’un écosystème médiatique et culturel sain pour les Canadiennes et les Canadiens de tous âges», peut-on lire.

Le défi, en ce qui a trait aux jeunes qui sont vissés au numérique, «est de capter leur attention, de les inspirer et de les accompagner avec des contenus canadiens qu’ils peuvent trouver facilement». Pour ce qui est des nouveaux arrivants, Radio-Canada entend leur offrir «des contenus qui reflètent (leurs) réalités et (leurs) aspirations». Quant aux non-utilisateurs et voix critiques, le document reconnaît que les membres de ce groupe «estiment être mal desservis ou oubliés par la Société. Nous voyons ce défi comme une chance unique d’établir un dialogue inclusif, de refléter leurs réalités et de leur offrir des contenus qui les informent et les divertissent.»

Comment y arriver? La société d’État sait qu’elle n’a d’autre choix que de «cibler davantage ces auditoires sur les plateformes numériques et les plateformes de tiers» et précise qu’il «faudra cesser ou transformer certaines activités», sans toutefois préciser lesquelles. «Nous serons là où les auditoires se trouvent en ligne, sur leurs plateformes favorites», promet-on en parlant de «contenu élargi sur des plateformes tierces (par exemple YouTube, TikTok, Twitch, Instagram), spécialement conçu pour atteindre de nouveaux segments d'auditoire». Également, elle dit vouloir répondre aux voix critiques «avec une programmation et une ligne éditoriale adaptées», sans autre précision.

Investir les régions

En région, le constat est incontournable. Comme tous les acteurs de l’industrie, la SRC constate que «l’information locale est en déclin et le journalisme perd du terrain dans les communautés». Elle entend donc consacrer «plus de ressources pour la couverture de l’actualité dans les régions: l’objectif est de financer une couverture supplémentaire et d'embaucher suffisamment de journalistes pour couvrir 15 à 20 communautés dont la population est supérieure à 50 000 habitants et qui n'ont actuellement aucune ou peu de présence locale de CBC/Radio-Canada», une intention qui sera certainement saluée par les régions en question à travers le Canada.

Un aperçu de cette démarche a d’ailleurs été dévoilé il y a deux semaines, avec l’annonce de l’ouverture d’un bureau-satellite à Lévis avec trois journalistes pour couvrir la région de Chaudière-Appalaches.

Plus encore, la stratégie évoque également un soutien des médias locaux par un «partage des ressources et formations en partenariat avec d’autres médias et partenaires pour renforcer les écosystèmes locaux d’information».

CBC/Radio-Canada compte également mieux représenter les enfants pauvres de la couverture médiatique en promettant «plus de culture, de musique et de sport amateur» et promet «davantage de production vidéo locale dans les régions». Elle prévoit aussi «élargir le réseau des créateurs de contenu et des influenceurs à travers le pays, pour diversifier les points de vue et les perspectives et augmenter les contributions aux plateformes numériques», mais il reste à savoir si elle entend embaucher elle-même ces créateurs de contenu et influenceurs.

Vaste éventail de préoccupations

On peut cependant s’attendre à une forme de sous-traitance, puisqu’elle annonce une «augmentation des investissements dans la production indépendante: en français et en anglais, et pour le contenu autochtone». Les Premières Nations, Inuit et Métis occupent ainsi une grande place dans ce plan stratégique, qui fait référence aux communautés autochtones et au besoin de mieux les desservir à de nombreuses reprises.

L’intelligence artificielle (IA) est également une préoccupation de CBC/Radio-Canada qui prévoit l’utiliser «dans les nouveaux produits et pour accroître l’accessibilité de ses services». On reconnaît toutefois que si «l’IA générative ouvre la voie à une efficacité accrue; en revanche, elle augmente le risque de mésinformation et de désinformation».

Bien que l’on ait évacué l’acronyme ÉDI (équité, diversité, inclusion) de la stratégie, au cœur de nombreux débats dans le passé, il n’en reste pas moins que «la Société réaffirme que son engagement à faire progresser la vérité et la réconciliation avec les Inuit, les Métis et les Premières Nations et que ses responsabilités en matière de diversité, d’accessibilité, et environnementales restent une priorité claire à l’horizon 2030».

Pierre Saint-Arnaud, La Presse Canadienne

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