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Le diocèse de Saint-Jérôme-Mont-Laurier aurait étouffé des agressions sexuelles

durée 13h40
21 novembre 2023
La Presse Canadienne, 2023
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Par La Presse Canadienne, 2023

MONTRÉAL — Encore une fois, un diocèse catholique est au banc des accusés pour avoir toléré de multiples agressions sexuelles commises par au moins deux de ses membres dans les années 1960 et 1970.

Une demande d’autorisation d’action collective a été déposée mardi contre le diocèse de Saint-Jérôme-Mont-Laurier par le demandeur Paul Dancause, au nom de toutes les victimes qui auraient été agressées sexuellement entre 1940 et aujourd’hui par des membres du clergé, des employés ou des bénévoles œuvrant pour ce diocèse.

L'affaire est étouffée

Le cas de M. Dancause, dont les deux frères ont aussi été agressés par le même prêtre, Maurice Valois, dans les années 1960, ne laisse aucun doute sur la connaissance des faits par les autorités ecclésiastiques. Une lettre rédigée par un travailleur social qui avait reçu le témoignage de Paul Dancause et de ses frères, alors qu’ils étaient en foyer d’accueil, avait été remise à l’évêque de l’époque, Émilien Frênette, qui avait étouffé l’affaire et déplacé le prêtre dans une autre région.

En 1971, Maurice Valois avait demandé au pape Paul VI une dispense perpétuelle de ses voeux sacerdotaux et sa laïcisation dans une longue lettre où il avouait avoir commis des agressions sexuelles multiples. 

Les frères de Paul Dancause avaient finalement porté plainte à la police en 1990 et le prêtre avait alors plaidé coupable en 1991 à des accusations d’attentat à la pudeur et de grossière indécence, telles que le formulait à l’époque le Code criminel. Les policiers, dans le cadre de leur enquête, avaient retrouvé et saisi la lettre du travailleur social à l’évêque Frênette et celle adressée au pape par le prêtre Maurice Valois, qui est aujourd’hui décédé.

Voleurs d'enfance

L'un des trois frères, Christian-Claude Dancause, avait écrit un livre intitulé «Les voleurs d'enfance» à l'issue du procès.

«J’ai vécu et je vis encore avec d’énormes conséquences, écrit Paul Dancause dans un communiqué. Mes trois enfants et mon épouse ont aussi souffert de mes comportements. Mon frère, qui a aussi été victime, s’est suicidé.

«À l’époque, nous n’étions que des enfants, mais nous avons réussi à dénoncer les agressions. Pourtant, aucune suite n’a été donnée à notre dénonciation. J’en ai parlé avec l’évêque de Saint-Jérôme qui m’a alors demandé de garder le silence. Il m’a même blâmé pour les gestes d’agressions sexuelles que j’avais subis par un membre de son diocèse.»

Un deuxième prêtre

Le demande d’autorisation, pilotée comme plusieurs autres de la même nature par le cabinet Arsenault Dufresne Wee avocats, présente un deuxième cas, celui d’un homme identifié seulement par les initiales M.D., qui a été agressé sexuellement à de multiples reprises alors qu’il était mineur par un autre prêtre du même diocèse, Gérard Lambert.

Gérard Lambert avait aussi été traduit en justice en 1994 et avait reconnu sa culpabilité à plusieurs chefs d’accusation d’agression sexuelle, grossière indécence et atteinte à la pudeur. Il était décédé la même année avant de connaître sa sentence.

Jusqu’ici, six personnes se sont manifestées dans ce dossier, mais le cabinet d’avocats s’attend à voir d’autres victimes s’ajouter à la demande.

La demande d’autorisation vise des dommages et intérêts pécuniaires et punitifs atteignant 600 000 $ pour chacune des victimes éventuelles. Elle est sans complaisance envers les autorités cléricales, soulignant que l’évêque et le diocèse, «qui se devaient d’enquêter et de sévir, ne l’ont pas fait. Ils ont choisi d’ignorer leur propre droit interne pour faire prévaloir la culture du silence.»

«Les Défendeurs n’ont jamais averti les autorités laïques, malgré leur connaissance directe des agressions sexuelles commises par Maurice Valois. Ils ont plutôt choisi de déplacer l’agresseur et de camoufler les actes répréhensibles commis par leur préposé, alors qu’ils en avaient été informés.»

La demande d’autorisation a été déposée au palais de justice de Saint-Jérôme.

Pierre Saint-Arnaud, La Presse Canadienne