La GRC envisage de modifier sa politique en matière de cannabis pour ses membres


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Par La Presse Canadienne, 2023
OTTAWA — La Gendarmerie royale du Canada (GRC) envisage d’assouplir une politique qui oblige les agents de première ligne et de nombreux autres employés à s’abstenir de consommer du cannabis à des fins récréatives pendant les quatre semaines précédant leur entrée en fonction.
Une modification de cette règle vieille de cinq ans pourrait favoriser le recrutement de nouveaux agents en alignant la police montée sur les forces de police qui ont des politiques beaucoup moins restrictives sur l’usage de la marijuana.
Une note d’information interne de la GRC, obtenue par La Presse Canadienne grâce à la Loi sur l’accès à l’information, recommande une restriction de 24 heures sur la consommation de cannabis avant de se présenter au travail, avec quelques exceptions.
Robin Percival, porte-parole de la GRC, affirme que la politique actuelle est en cours d’examen, mais qu’aucune décision définitive n’a été prise.
Une politique de 2018
Le règlement est entré en vigueur en 2018 lorsque le Canada a légalisé le cannabis récréatif.
Il exige que les employés de la GRC occupant des postes critiques pour la sécurité s’abstiennent de consommer du cannabis non médicinal 28 jours avant de se présenter au travail.
La politique couvre un large éventail d’employés, des officiers aux réservistes en passant par les opérateurs de télécommunications et les techniciens d’armes à feu.
La GRC affirme avoir examiné tous les aspects de ses activités lors de l’élaboration du règlement de 2018 sur la consommation de substances psychoactives. Elle a estimé que ses membres travaillent partout au Canada dans un environnement particulier, notamment en tant que premiers intervenants, dans des milieux ruraux et isolés, et qu’ils peuvent être appelés à se présenter au travail en tout temps.
«Tous les employés de la GRC doivent être aptes à remplir leurs fonctions lorsqu’ils se présentent au travail, ce qui signifie notamment qu’ils ne doivent pas avoir les facultés affaiblies par l’alcool ou la drogue», indique un avis sur le site web de la GRC expliquant cette politique.
«Les scientifiques ont montré que les effets du cannabis peuvent persister après la consommation initiale et qu’on n’a pas encore pu établir une limite claire à la consommation sécuritaire de cannabis ni mesurer le degré auquel la consommation de cannabis nuit au rendement. En ce moment, sans données scientifiques confirmées sur l’effet du cannabis sur les facultés, la GRC adopte une politique prudente afin d’assurer le maintien de la sécurité du public et de ses employés en tout temps.»
Un obstacle à l'embauche
Taylor, 32 ans, dit qu’il souhaite travailler à la GRC, mais qu’en tant que consommateur de marijuana à des fins récréatives, il aimerait que la politique de la GRC soit modifiée.
La Presse Canadienne a accepté de ne pas publier le nom complet de l’homme de Colombie-Britannique parce qu’il craint que le fait d’exprimer ouvertement son mécontentement à l’égard de la politique actuelle ne compromette ses chances de devenir membre de la GRC.
Taylor a déclaré dans une entrevue qu’il appréciait le cannabis chaque semaine en tant que drogue récréative lorsque l’usage personnel est devenu légal. Il a ensuite commencé à en consommer pour soulager des douleurs mineures ou simplement pour évacuer le stress.
La police montée était la seule police que Taylor a connue lorsqu’il grandissait en Colombie-Britannique.
«Dans ma famille, on nous a toujours appris à respecter l’autorité et la police, à les considérer comme des amis et à leur dire qu’ils sont là pour nous aider», explique-t-il.
«Dans toutes les situations où j’ai été en contact avec eux, ils ont été formidables avec moi, et c’est l’uniforme que j’aimerais porter pour rendre à ma communauté ce qu’elle m’a donné. Ils ont de solides traditions canadiennes, mais ils sont tellement en retard dans leur politique. Je pense que les temps changent et que les politiques doivent aussi changer.»
Taylor s’est dit encouragé d’apprendre que la GRC revoyait sa politique en matière de cannabis.
«Je peux honnêtement dire que si la GRC annonçait demain qu’elle modifie sa politique, je poserais ma candidature dès demain.»
Il a l’intention de soumettre sa candidature à la GRC au cours de la prochaine année et affirme qu’il respectera la politique en vigueur, quelle qu’elle soit, s’il devient membre de la police montée. Mais, ajoute-t-il, si la GRC adopte une politique plus souple, «je serais beaucoup plus heureux».
Un risque variable
La note d’information du printemps 2023, préparée pour le commissaire de la GRC Michael Duheme, indique que le risque d’affaiblissement des facultés par le cannabis varie en fonction de la personne, des modes de consommation et des qualités du produit.
Il est souligné que les statistiques de la GRC concernant les allégations de violation du Code de conduite pour les cinq dernières années indiquent que les cas de facultés affaiblies connus sont inférieurs à 0,15 %, sur un total de 18 000 membres réguliers.
«Les services de police qui appliquaient initialement une tolérance zéro ou une restriction de 28 jours ont adopté ou sont en train d’adopter une exigence d’aptitude au travail ou d’abstinence de 24 heures, ou une combinaison des deux.»
Selon la note, la Fédération de la police nationale, qui représente les membres de la police montée, a fait savoir au début de l’année que l’une des questions les plus fréquemment posées lors des sessions de recrutement «concernait notre politique sur l’usage récréatif du cannabis».
La fédération n’a fait aucun commentaire sur la note d’information et la révision de la politique.
La restriction proposée de 24 heures sur la consommation de cannabis récréatif avant le travail s’appliquerait à tous les postes sensibles à la sécurité au sein de la GRC, à l’exception de ce que l’on appelle les groupes professionnels spécialisés.
Il s’agit notamment des pilotes, des aiguilleurs du ciel, des membres des équipes d’intervention d’urgence et des services de protection du premier ministre et de la gouverneure générale.
Jim Bronskill, La Presse Canadienne