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La Cour suprême examine cette semaine la légalité des droits de douane de Trump

durée 07h00
2 novembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

WASHINGTON — La politique tarifaire de Donald Trump se heurte cette semaine à un obstacle juridique majeur: la Cour suprême des États-Unis. Quel que soit le verdict, le Canada ne sera pas épargné par les droits de douane dévastateurs imposés par le président.

La Cour suprême examinera mercredi les arguments d'entreprises et d'États qui contestent l'illégalité du recours par Donald Trump à une loi relative à la sécurité nationale – la loi de 1977 sur les pouvoirs économiques d'urgence internationaux (IEEPA) – pour imposer des droits de douane à la quasi-totalité des pays.

L'audience regroupera deux affaires: l'une contestant ce que l'on appelle généralement les droits de douane réciproques du président, et l'autre s'opposant également aux droits de douane liés au fentanyl imposés au Canada, au Mexique et à la Chine.

Cette décision n'aura toutefois aucune incidence sur l'utilisation croissante par Donald Trump des droits de douane en vertu de l'article 232 de la loi de 1962 sur l'expansion du commerce, qui pénalisent déjà fortement les industries canadiennes de l'acier, de l'aluminium, de l'automobile, du bois et du cuivre.

Le premier ministre Mark Carney a averti à plusieurs reprises les Canadiens qu'il est probable que des droits de douane subsistent, même si son gouvernement libéral négocie un accord avec l'administration américaine.

Bien qu'il semble y avoir un consensus international sur le fait que Donald Trump a profondément transformé le commerce mondial, les nations, dont le Canada, suivront de près la question de savoir si l'outil tarifaire de prédilection du président résistera à une contestation judiciaire.

Les avocats représentant les entreprises affirment qu'ils plaideront devant la Cour suprême des États-Unis que la loi, généralement désignée par l'acronyme IEEPA, n'a jamais eu pour but de conférer au président des pouvoirs étendus en matière de droits de douane.

La Constitution américaine confère au Congrès le pouvoir d'imposer des taxes et des droits de douane. L'IEEPA autorise certes le président américain à contrôler les transactions économiques après avoir déclaré l'état d'urgence, mais elle ne contient pas le terme «droit de douane» ni aucun synonyme.

Les avocats soutiendront également que, même si la Cour suprême juge que l'IEEPA peut être utilisée pour imposer des droits de douane, la loi exige que cela soit une réponse à une menace inhabituelle et extraordinaire. On affirme que les déficits commerciaux – sur lesquels Donald Trump s'est appuyé pour justifier ses droits de douane «réciproques» – ne constituent pas une menace extraordinaire.

Cependant, la Cour pourrait rendre une décision partagée, car les droits de douane liés au fentanyl reposent sur une théorie juridique légèrement différente, a déclaré Michael McConnell, professeur à la faculté de droit de Stanford.

La Cour suprême pourrait confirmer l'état d'urgence décrété par le président concernant le fentanyl et, par conséquent, les droits de douane généralisés imposés au Canada.

Carlo Dade, directeur des politiques internationales et de la Nouvelle Initiative Amérique du Nord à l'École de politiques publiques de l'Université de Calgary, a estimé que si la Cour invalide les droits de douane réciproques, mais confirme ceux motivés par la menace du fentanyl, le Canada se trouvera dans une situation délicate sur la scène internationale.

«Si les droits de douane associés au fentanyl sont maintenus, nous serons contraints de les appliquer de manière permanente, partout et sans restriction, a expliqué M. Dade, ajoutant que cela pourrait considérablement affaiblir le Canada à l'échelle mondiale.

Les négociations sur pause

En mars, Donald Trump a imposé au Canada des droits de douane généralisés de 25 % en déclarant l'état d'urgence à la frontière nord en raison de l'afflux de fentanyl, une drogue mortelle. Ces droits de douane ne s'appliquent pas aux marchandises conformes à l'Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM).

Selon les données du gouvernement américain, le volume de fentanyl saisi à la frontière nord est infime comparativement à celui saisi à la frontière américano-mexicaine. Ottawa a toutefois pris des mesures pour apaiser les inquiétudes de Donald Trump: nomination d'un «tsar du fentanyl», introduction d'un projet de loi sur la sécurité frontalière et déploiement accru d'hélicoptères et de drones.

Les négociations avec l'administration Trump sont restées difficiles et le président a porté les droits de douane sur les produits canadiens à 35 % en août, reprochant à Ottawa son manque de coopération pour freiner le trafic de fentanyl.

Carney a semblé stabiliser les relations bilatérales lors d'une visite à la Maison-Blanche en octobre.

Le premier ministre a déclaré que l'exemption de l'ACEUM concernant les droits de douane liés au fentanyl place le Canada dans une position plus avantageuse que la plupart des autres pays et les responsables canadiens se sont efforcés d'atténuer l'impact des droits de douane sectoriels imposés par Donald Trump.

Le premier ministre a indiqué que des progrès avaient été réalisés dans les négociations commerciales, mais une publicité commanditée par l'Ontario, citant l'ancien président Ronald Reagan, a de nouveau suscité la colère du président américain.

Le président a mis fin aux négociations, alléguant que le Canada tentait d'influencer la Cour suprême avant l'audience de cette semaine.

M. Dade a affirmé que, quel que soit le résultat de l'audience, le Canada devra faire face à des droits de douane.

Si les droits de douane liés au fentanyl diminuent, a-t-il ajouté, cela atténuera la crise que traverse le Canada, provoquée par les droits de douane de l'administration Trump. Actuellement, lorsque le président change d'avis sur les droits de douane, cela peut avoir des répercussions sur l'ensemble de l'économie canadienne et «tout le monde se bouscule», a-t-il déclaré.

«Si l'on adopte le régime de l'article 232, le président doit choisir une catégorie. Il doit demander une enquête, a expliqué M. Dade. L'enquête doit suivre son cours.»

Ce dernier a également souligné que Donald Trump dispose d'autres outils pour imposer des droits de douane à l'ensemble de l'économie d'autres pays, mais que ces lois sont plus restrictives et limitées.

Quoi qu'il en soit, a-t-il conclu, le Canada doit se préparer. «Les Américains tentent de réécrire les règles du commerce mondial, a déclaré M. Dade. Nous souffrons, tout le monde souffre, mais nous allons devoir trouver une autre solution.»

Kelly Geraldine Malone, La Presse Canadienne

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