La communauté juive canadienne réclame des actions après la tuerie de Sydney

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Par La Presse Canadienne, 2025
OTTAWA — Une organisation appelle tous les niveaux de gouvernement à protéger les communautés juives du Canada à la suite de la fusillade de masse survenue lors d'une célébration de Hanoukka en Australie.
En entrevue avec La Presse Canadienne, le chef de la direction du Centre consultatif des relations juives et israéliennes, Noah Shack, a soutenu qu'il est «urgent» d'agir.
«Les pensées et les prières peuvent apporter un certain réconfort après une tragédie, mais nous devons agir pour nous assurer qu'une telle tragédie ne se produise pas ici, au Canada», a fait valoir M. Shack.
Quinze personnes ont été tuées et au moins 38 autres ont été blessées en Australie dimanche lors d'un événement de Hanoukka à la plage de Bondi.
Les autorités ont identifié un père et son fils comme responsables de l'attaque. Le père, âgé de 50 ans, a été abattu sur place. Son fils de 24 ans est soigné dans un hôpital de Sydney et fait face à 59 chefs d'accusation.
«Possibilité réaliste»
Lundi, le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) a affirmé n’avoir décelé aucune menace spécifique au Canada, mais a souligné la «possibilité réaliste» d’une attaque extrémiste contre la communauté juive au pays.
Dans une note de renseignement, le Centre intégré d’évaluation des menaces du SCRS a noté que les événements festifs, notamment les célébrations de Hanoukka, «resteront vraisemblablement une cible privilégiée pour les groupes extrémistes violents qui cherchent à s’en prendre aux intérêts occidentaux, à certaines communautés religieuses et ethniques et à des sites emblématiques connexes».
«Il n’existe actuellement aucune information faisant état d’une menace spécifique visant les célébrations des fêtes de 2025 au Canada, notamment celles de Hanoukka, de la part d’acteurs malveillants ou de groupes extrémistes violents transnationaux», pouvait-on lire dans la note.
Dans la foulée de l'attentat en Australie, certains corps policiers ont annoncé qu'ils renforceraient leur présence dans les communautés juives.
Appliquer les lois
Selon M. Shack, le harcèlement et l'intimidation sont «incessants» et «doivent cesser» dans les quartiers, les lieux de culte, les écoles et les garderies.
Son organisation demande l'application des lois déjà en vigueur.
«La police et les procureurs doivent être habilités et chargés de traduire les auteurs en justice. Tout obstacle structurel, politique ou législatif doit être éliminé, tout en protégeant nos libertés fondamentales», a plaidé M. Shack.
«Si les lois ne sont pas appliquées, cela va non seulement nuire à notre sécurité, mais aussi à notre confiance envers le système judiciaire.»
M. Shack réclame aussi plus «d'investissements et d'optimisation» des subventions gouvernementales en matière de sécurité, de même que la priorisation des ressources policières et du renseignement.
À son avis, il faut aussi, «de manière sérieuse», mettre en place des mesures pour lutter contre le terrorisme et la radicalisation.
«Il faut mettre un frein à la glorification incontrôlée des organisations et des actions terroristes à laquelle nous assistons», a-t-il tranché.
«Nous devons trouver un moyen d'accélérer leur expulsion, afin que les personnes à haut risque liées à des organisations terroristes étrangères soient expulsées plus rapidement de ce pays, tout en renforçant les contrôles à l'immigration, afin de les empêcher d'entrer sur le territoire.»
Incendies et fusillades
Les communautés juives à travers le Canada ont connu une recrudescence de la violence et de la haine antisémite ces dernières années.
Des incendies criminels ont eu lieu dans des synagogues de Montréal et Vancouver, le Monument national de l'Holocauste a été vandalisé, tandis qu'une femme a été attaquée dans la section casher d'une épicerie à Ottawa. À Toronto, une école de filles juives a été la cible de trois fusillades en 2024.
Le ministre fédéral de la Sécurité publique, Gary Anandasangaree, a rencontré mercredi des dirigeants de la communauté juive, des députés, sa sous-ministre et les chefs de la GRC, du SCRS et de l'Agence des services frontaliers.
«Une rencontre essentielle pour réaffirmer que notre gouvernement soutiendra toujours les communautés juives au Canada», a écrit M. Anandasangaree sur les réseaux sociaux.
Le député libéral de Mont-Royal, Anthony Housefather, a participé à cette discussion. Il a demandé aux organisations de rendre public le travail qu'elles accomplissent pour assurer la sécurité des Canadiens juifs.
«J'ai également clairement indiqué que, pour se sentir en sécurité, les Canadiens juifs auront besoin de voir la police locale appliquer la loi lorsque nous sommes pris pour cible», a déclaré M. Housefather.
Tirer des leçons
Selon M. Shack, tous les ordres de gouvernement doivent s'engager fermement à protéger les Canadiens contre la violence.
Dans cette «période effrayante» pour les Juifs, il espère que les gens se rendront compte qu'il ne s'agit pas seulement d'un affront à la communauté juive, mais d'une «atteinte aux valeurs canadiennes».
«Depuis deux ans, notre communauté tire la sonnette d'alarme, tout comme la communauté juive australienne. Leur gouvernement n'a pas répondu à l'appel et, aujourd'hui, 16 personnes sont mortes», a affirmé M. Shack.
«Nos dirigeants ici au Canada peuvent soit tirer les leçons des échecs dévastateurs des autres, soit les répéter. Les enjeux sont donc très importants et il est urgent d'agir.»
— Avec des informations d'Anja Karadeglija
Catherine Morrison, La Presse Canadienne