L'intelligence artificielle menace l'accès des jeunes aux emplois de premier échelon


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Par La Presse Canadienne, 2025
OTTAWA — De nouvelles recherches montrent que la diffusion de l'intelligence artificielle ronge déjà l'offre d'emploi dans de nombreux domaines, dont l'informatique, et qu'elle touche particulièrement les jeunes.
Une récente étude universitaire de l'Université de Stanford révèle que les jeunes travailleurs âgés de 22 à 25 ans occupant les postes les plus exposés à l'IA ont connu une baisse d'emploi, tandis que l'emploi des travailleurs expérimentés et des secteurs moins exposés est resté stable ou a continué de croître.
Tout au long de son parcours universitaire, Jacqueline Silver a cru que son diplôme en informatique lui garantirait un emploi. Découvrir qu'elle avait tort a été une expérience démoralisante.
Mme Silver, récemment diplômée de l'Université McGill et résidant maintenant à Toronto, a passé plus d'un an à postuler à des centaines d'emplois avant de finalement en trouver un dans son domaine ce mois-ci.
«J'étais vraiment épuisée, et c'était aussi très décourageant», a-t-elle confié, qui a souligné que plusieurs de ses camarades de classe avaient également eu du mal à trouver du travail.
«C'était comme si j'étais inscrite à un cours supplémentaire, car j'allais à la bibliothèque faire mes devoirs pour chaque cours, puis je passais le même temps à postuler.»
Elle ne sera probablement pas la dernière à se démener pour trouver du travail.
Hamoon Ekhtiari est PDG de FutureFit AI, une entreprise canadienne qui utilise l'intelligence artificielle comme courroie entre les personnes et les emplois. Il a indiqué que les professions les plus exposées à l'IA comprennent les postes juniors dans le développement de logiciels, la vente, le marketing et le service client.
M. Ekhtiari a déclaré que l'impact de l'IA sur l'emploi est «très complexe».
«L'IA créera de nombreux emplois et opportunités, et elle affectera de nombreux autres emplois», a-t-il déclaré.
Mme Silver a indiqué que les outils d'IA générative comme ChatGPT sont capables d'effectuer des tâches comme l'écriture de code «assez bien», ce qui représente une menace pour les emplois de premier échelon dans son domaine.
«Peut-être qu'il faut encore quelqu'un pour peaufiner ou examiner le projet de près, mais globalement, il n'est plus vraiment nécessaire de mobiliser autant de personnes pour le développer, car l'IA générative permet de le faire», a-t-elle expliqué.
M. Ekhtiari estime que les entreprises doivent anticiper le court terme et cultiver les jeunes talents. Il a également ajouté que les écoles doivent mieux orienter les individus vers la formation professionnelle et que les gouvernements doivent s'engager davantage pour accompagner les transitions professionnelles.
«Autrefois, on promettait: quatre ans d'études, et 40 ans de carrière, a-t-il expliqué. Cette promesse n'est plus valable.»
Catherine Connelly, professeure de ressources humaines et de gestion à l'Université McMaster, a déclaré que certaines entreprises constatent que l'IA ne va «définitivement pas» remplacer l'humain dans les emplois impliquant la stratégie et la prise de décision.
«Parfois, l'outil peut servir à automatiser certaines tâches de base, a-t-elle ajouté. Il existe un risque que certaines personnes n'aient pas la possibilité d'occuper un poste de débutant, où elles accomplissent des tâches routinières que personne d'autre ne veut faire.»
Le chômage a atteint 14,7 % chez les Canadiens de 15 à 24 ans en septembre, a indiqué Statistique Canada vendredi dernier. Il s'agit d'un sommet en 15 ans, hors pandémie.
Le député conservateur Garnett Genuis a averti mercredi que «l'aggravation de la crise du chômage chez les jeunes» affectera le parcours professionnel des jeunes travailleurs pour le reste de leur vie.
Il a accusé les libéraux de ne pas avoir de stratégie pour lutter contre le chômage des jeunes et a présenté une proposition conservatrice visant à accroître le soutien financier à l'éducation dans les domaines à forte demande et à encourager les employeurs à construire des logements pour les travailleurs.
Jennifer Kozelj, porte-parole de la ministre de l'Emploi et de la Famille, Patty Hajdu, a indiqué dans un courriel que l'IA est désormais omniprésente, des hôpitaux aux salles de classe.
«Le monde du travail évolue rapidement, et les travailleurs, en particulier les jeunes canadiens, en ressentent les effets, a-t-elle déclaré. La période actuelle est difficile, mais nous agissons avec urgence pour exploiter cet outil, accroître la productivité et veiller à ce qu'aucun travailleur ne soit laissé pour compte.»
— Avec des informations de Craig Lord
Catherine Morrison, La Presse Canadienne