Des vagues de chaleur plus intenses, plus fréquentes et plus mortelles


Temps de lecture :
3 minutes
Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — Les changements climatiques, principalement causés par les combustibles fossiles, aggravent de plusieurs façons les vagues de chaleur dangereuses, comme celle qui sévit présentement sur une partie de l'Amérique du Nord.
Lundi, Environnement Canada a émis des avertissements de vagues de chaleur dangereuses pour une partie de l’Ontario et du Québec.
Au même moment aux États-Unis, des dizaines de millions de personnes dans le Midwest et l'Est subissaient une troisième journée étouffante de chaleur.
C’est le même dôme de chaleur qui est en cause, une vaste zone de haute pression dans la haute atmosphère qui emprisonne la chaleur et l'humidité.
Une telle chaleur à ce moment-ci de l'année est plutôt inhabituelle, comme en témoigne le record battu de 33,1 degrés Celsius pour un 23 juin à Montréal enregistré en 1921.
À 14h lundi, il faisait 33,8 degrés dans la métropole québécoise, selon Environnement Canada.
Si cette température est inhabituelle, elle n'est pas surprenante pour ceux qui étudient le climat.
«Même les modèles climatiques les moins avancés dans les années 2000 étaient assez précis concernant les vagues de chaleur» qui, selon les scénarios de l’époque, «seraient plus fréquentes et sévères dans les années 2020 et 2030», a expliqué le directeur de la recherche en adaptation à l’Institut climatique du Canada, Ryan Ness.
Des vagues de chaleur qui se déplacent plus lentement
Non seulement les changements climatiques causent plus de vagues de chaleur, mais ils font également en sorte que celles-ci se déplacent plus lentement, selon une étude menée par des chercheurs de l'Université d'État de l'Utah et de l'Université de Princeton, publiée récemment dans la revue Science Advances.
L’analyse, par les chercheurs, de vagues de chaleur sur une période allant de 1979 à 2020, montre que la vitesse de déplacement de celles-ci a diminué d'environ 8 km par jour au cours de cette période.
Les vagues de chaleur restent donc plus longtemps au-dessus d’une même région.
Les chercheurs ont utilisé des modèles climatiques pour simuler deux scénarios – avec et sans émissions de gaz à effet de serre.
Cette simulation leur a permis de conclure que le changement de comportement des vagues de chaleur s’expliquait par la quantité d’émissions de chaleur piégées dans l’atmosphère provenant de la combustion du charbon, du pétrole et du gaz naturel.
Décès à la hausse
Les vagues de chaleur causent de plus en plus de décès.
Un récent rapport de surveillance publié par l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) estime que 623 décès par année, en moyenne, seraient attribuables à la chaleur estivale pour la période de 2010-2024.
À l’été 2024, année la plus chaude jamais enregistrée au Québec, mais aussi dans le monde, 841 décès ont été comptabilisés dans les différentes régions de la province en raison de la chaleur.
L’analyse de l’INSPQ révèle également que la région de Montréal est celle qui «compte la plus grande proportion de décès attribuables à la chaleur par rapport aux autres régions pour la période de 2010-2024».
Selon Environnement et Changement climatique Canada, la vague de chaleur qui a frappé le centre et l’est du Canada en juin 2024 était deux à dix fois plus susceptible de se produire à cause des changements climatiques.
Les chaleurs extrêmes coûteront cher au réseau de la santé
Les systèmes de santé sont de plus en plus sollicités en raison des vagues de chaleur provoquées par les changements climatiques.
Selon une équipe de l’Institut national de la recherche scientifique qui a collaboré avec l’Institut national de santé publique du Québec et Santé Canada, le fardeau associé à la chaleur au Québec se chiffre annuellement à 15 millions $ en termes de soins de santé (coûts directs); à 5 millions $ en termes d’absentéisme (coûts indirects); «et à 3,6 milliards $ en pertes de vies humaines et de bien-être, c’est-à-dire la diminution des activités durant les périodes de forte canicule (coûts intangibles)».
Bien que les vagues de chaleur soient plus intenses et durent plus longtemps qu’avant, Environnement Canada soutient que la vague de chaleur qui est au-dessus du Québec actuellement ne devrait pas rester longtemps.
«Ce n'est pas quelque chose qui va durer quatre ou cinq jours» et «à partir de la journée de mercredi, on s'attend à des températures plus proches de la normale», a expliqué Éric Tomlinson, météorologue chez Environnement Canada.
D'ici là, «on suggère aux gens de porter plus attention aux personnes qui sont vulnérables, les plus âgées, les plus jeunes et ceux qui sont malades», a rappelé Éric Tomlinson.
Stéphane Blais, La Presse Canadienne