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Des professionnels de l'APTS dénoncent les inégalités dans les soins aux aînés

durée 06h00
1 octobre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

MONTRÉAL — Dans une nouvelle campagne qu'elle lance mercredi, l'APTS expose ses préoccupations quant aux soins donnés aux aînés au Québec, notamment les inégalités dans le soutien à domicile et dans la qualité des services en hébergement.

L’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) souhaite notamment donner la parole aux personnes âgées et à leurs proches en espérant que les décideurs entendront leur témoignage. Le syndicat a créé un espace sur sa page Facebook pour recevoir les récits des gens qui reçoivent des soins et services.

La campagne s'intitule «Regarder nos vieux jours en face: et si on osait pour vrai?». Elle vise à mettre en lumière des lacunes importantes autant dans les milieux d'hébergement que le soutien à domicile.

«On veut faire ressortir qu'il faut avoir des moyens financiers pour vivre plus dans la dignité. Parce qu'on l'observe, les entreprises privées s'installent de plus en plus avec la facture qui vient avec. Et étant donné que ce n'est pas tout le monde qui a accès à ça, on vient un peu créer des différences de classes de personnes âgées: ceux qui ont les moyens, ceux qui les ont moins. Ça nous inquiète», mentionne le président de l'APTS, Robert Comeau.

«Dans le cadre de mon travail, je constate quotidiennement qu'on n'est pas égaux devant la maladie, malheureusement, affirme Marc-André Paquette, ergothérapeute dans un CLSC en soutien à domicile. Les personnes qui ont plus de ressources financières se débrouillent beaucoup mieux à domicile que les personnes qui en ont moins parce que tout n'est pas couvert au niveau des services publics par rapport aux choses qu'on peut avoir besoin quand on perd l'autonomie.»

Il donne en exemple les culottes d'incontinence dont les frais seraient remboursés pour un patient dans la cinquantaine qui a subi un AVC, mais pas pour un septuagénaire qui est atteint de la maladie d'Alzheimer.

M. Paquette s'inquiète aussi d'un manque d'argent dans le programme d'adaptation de domicile de la Société d'habitation du Québec, qui permet d'adapter un logement pour que la personne puisse y rester à long terme. «Je pense qu'inévitablement, dans les prochaines années, on va avoir des personnes en lourde perte d'autonomie à domicile qui de surcroît vont devoir rester dans des domiciles moins adaptés du fait que le gouvernement ne va pas refinancer ce programme suffisamment», dit-il.

L'attente pour une place en hébergement

L'APTS dénonce aussi les «délais d’attente insoutenables» pour avoir accès à une place en hébergement. M. Paquette est témoin de plusieurs usagers qui ont complété leur demande en bonne et due forme pour une place adaptée à leurs besoins. «J'en vois beaucoup qui ont déjà passé à travers le mécanisme. Il est reconnu qu'ils ont besoin d'une place en hébergement, mais la place peut prendre six mois, un an, deux ans avant d'être libérée», expose-t-il, craignant des situations «où la personne pourrait subir un préjudice grave».

Anika Doire est technicienne en éducation spécialisée en maison des aînés et maison alternative. Elle rappelle que de nombreuses personnes âgées vont fréquenter plusieurs milieux de vie avant d'atterrir en centre d'hébergement. «Chaque fois, un transfert dans un autre milieu, ça peut avoir des impacts directs sur le résident et aussi sur les familles. Des fois, ils arrivent en hébergement, ils sont épuisés et ils n'ont plus confiance envers le système de santé», raconte-t-elle.

Mme Doire ajoute que les ressources matérielles en centre d'hébergement sont souvent désuètes. Il y aurait un besoin pour plus de lits bariatriques et des lits de meilleure qualité en général. «Ça répondrait aux besoins du résident, mais aussi des employés parce que si on travaille avec du matériel adapté aux besoins, ça diminue les risques de blessure pour nous, les employés. Je dirais que les employés sont assez créatifs, mais des fois, malheureusement, on ne peut pas répondre toujours à leurs besoins. Puis c'est déchirant de dire ça à un résident ou à une famille», témoigne-t-elle.

Ça va bien, si on est en bonne santé

Le président de l'APTS croit que le Québec est capable de garder les aînés le plus longtemps possible chez eux. Toutefois, il arrive qu'à certains moments l'hébergement avec soins devienne le meilleur milieu pour la personne. «À ce moment-là, il faut avoir des ressources nécessaires pour le faire, des ressources publiques. Ça ne passe pas toujours par la maison des aînés, mais par des CHSLD rénovés où on respecte l'intimité des gens avec des salles de bain privées, avec les milieux de vie plus adaptés. C'est tout ça qui est à repenser en fait», explique M. Comeau.

«C'est des gens qui sont sans parole, sans défense et qui prennent bien ce qu'on leur donne. Sincèrement, quand on fait le tour des CHSLD et des résidences, des fois, c'est un peu gênant», déplore M. Comeau.

Mme Doire a demandé à ses collègues qu'elle était leur interprétation de vieillir au Québec. «Si on est en bonne santé, somme toute, ça va bien, mais dès qu'on a des enjeux, avec le contexte actuel, c'est difficile pour plusieurs personnes d'avoir accès aux ressources dont elles ont besoin», dit-elle, résumant ce qui est ressorti de son coup de sonde.

De son côté, M. Paquette aimerait que la population s'intéresse davantage aux enjeux politiques qui entourent les soins de santé au Québec. «On ne connaît pas l'avenir, mais il y a bon nombre d'entre nous qui allons sans doute connaître des pertes d'autonomie dans leur vie, qui vont avoir besoin de l'aide du système pour se sortir de ça ou traverser ces situations. Et en ce moment, la capacité du réseau à subvenir aux besoins de la population est vraiment fracturaire», conclut-il.

La couverture en santé de La Presse Canadienne est soutenue par un partenariat avec l'Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est seule responsable de ce contenu journalistique.

Katrine Desautels, La Presse Canadienne

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