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Budget Girard: beaucoup de groupes restent sur leur faim

durée 16h37
21 mars 2023
La Presse Canadienne, 2023
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Par La Presse Canadienne, 2023

QUÉBEC — On aurait pu s’attendre à ce que les employeurs se réjouissent des baisses d’impôt confirmées dans le budget du ministre Eric Girard, mais leur position face au budget est plus nuancée.

«Les particuliers sortent gagnants; les entreprises un petit peu moins», juge Charles Milliard, président-directeur général de la Fédération des chambres de commerce du Québec.

Comme regroupement du milieu des affaires, les baisses d’impôt, «on n’est pas contre», mais il aime moins la façon d’y parvenir.

«Diminuer les versements au Fonds des générations, pour nous c’est une erreur, parce que c’est un outil apolitique à long terme pour financer le remboursement de la dette. Là, malheureusement, on ouvre une brèche politique à vouloir aller piger dans cet outil-là qu’on n’avait pas touché depuis 15 ans», a déploré M. Milliard.

Le son de cloche est similaire au Conseil du patronat du Québec. «Le budget répond à plusieurs préoccupations économiques, sociales et environnementales. Il y a de bonnes mesures. Il y a beaucoup d’investissements dans l’éducation, pour les jeunes, pour la santé», a d’abord noté Norma Kozhaya, économiste en chef au Conseil du patronat du Québec.

Elle note «des mesures intéressantes» pour atténuer la pénurie de main-d’œuvre, notamment celles qui touchent les modifications au Régime des rentes du Québec.

Toutefois, elle fronce les sourcils devant la voie choisie par le ministre des Finances pour parvenir à baisser les impôts. «C’est un peu notre bémol. On questionne davantage le moyen utilisé, qui est celui des versements plus faibles au Fonds des générations», déplore Mme Kozhaya.

Les Manufacturiers et exportateurs du Québec, de leur côté, sont déçus. C’est «un budget timide, sans mesure phare», a laissé tomber la présidente-directrice générale Véronique Proulx.

Ses membres manufacturiers ont deux priorités: la pénurie de main-d’œuvre et la hausse de la productivité. Il y a bel et bien des mesures pour alléger le manque de travailleurs, comme la formation de courte durée, la reconnaissance des diplômes des gens qui viennent de l’extérieur et la francisation en entreprise, mais «c’est saupoudré» et, de ce fait, ça aura peu d’effets, craint-elle.

Pour ce qui est de la hausse de productivité, les manufacturiers auraient eu besoin d’un solide coup de pouce pour accélérer l’automatisation et la robotisation. Avec ce budget, «ils ne sont pas en train de mettre le pied sur l’accélérateur pour inciter les entreprises à investir», critique Mme Proulx.

La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), elle, se réjouit des baisses d’impôt, de même que des mesures pour alléger la pénurie de main-d’œuvre et de la révision de certaines règles à la Régie des rentes.

Mais son vice-président pour le Québec, François Vincent, aurait souhaité une diminution du fardeau fiscal des petites et moyennes entreprises.

CSN et APTS

Les organisations syndicales aussi sont déçues des choix budgétaires du gouvernement Legault.

«Le titre du budget, c’est un Québec engagé, mais on ne sait pas en quoi c’est engagé. Le gouvernement a un œil sur la dette, sur les impôts, mais on dirait qu’il n’y a pas de direction générale pour le Québec. On vit des problèmes de transition économique, des problèmes de main-d’œuvre, des problèmes dans les services publics, dans les investissements dans les infrastructures, Mais on ne sent pas la vision», a critiqué Caroline Senneville, présidente de la CSN.

Pour ce qui est du Régime des rentes du Québec, la CSN se réjouit de voir les mesures pour lesquelles elle avait plaidé lors des consultations particulières. «Ce sont de petites mesures qui sont mises en place: la cotisation facultative à 65 ans, pouvoir reporter l’âge où on demande la RRQ de 70 à 72 ans, c’était toutes mes mesures sur lesquelles on s’était prononcé favorablement.» Et la centrale syndicale fait partie de ceux qui avaient demandé de ne pas hausser l’âge minimal d’admissibilité à la retraite de 60 à 62 ans – et c’est la voie suivie dans le budget Girard.

L’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux se désole aussi des baisses d’impôt. «Les baisses d’impôt, c’est une façon avec laquelle l’État s’empêche d’investir davantage dans les services publics», a déploré Émilie Charbonneau, deuxième vice-présidente de l’APTS.

Le logement: pas réglé

Chez les défenseurs des locataires, c’est la grande déception. Le budget contient «de très, très mauvaises nouvelles pour les ménages locataires qui sont complètement désespérés partout au Québec», a résumé en entrevue Véronique Laflamme, du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU).

«Il y a 1500 logements annoncés dans le cadre du nouveau programme d’habitation abordable, mais ce sont des logements abordables dont on ne sait pas combien pourraient être sociaux hors marché privé, ni combien seront destinés à des ménages locataires à faible revenu, qui sont 40 000 sur une liste d’attente actuellement au Québec», a critiqué Mme Laflamme. 

Lia Lévesque, La Presse Canadienne