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Un historien obtient des photos des opérations de sauvetage de l'Empress of Ireland

durée 10h57
21 janvier 2023
La Presse Canadienne, 2023
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Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2023

MONTRÉAL — Deux photographies mises en vente sur le site eBay ne semblaient qu'être un rappel de passé maritime du Québec. On y voit des hommes dans une barque au début du XXe siècle. La légende est simple: phare, Gaspé 1910.

Mais l'historien David Saint-Pierre, à qui un ami avait envoyé le lien internet, a rapidement compris que ces deux images étaient plus importantes que cela.

Primo, ce n'était pas le phare de Gaspé, mais celui de Pointe-au-Père, près de Rimouski. Secundo: les hommes dans la barque, c'étaient des soldats britanniques qui participaient aux opérations de renflouement à la suite du plus meurtrier désastre maritime de l'histoire du Canada: le naufrage du RMS Empress of Ireland en 1914.

«Dès que j'ai vu ces deux photographies, je savais qu'elles étaient reliées aux opérations de renflouement de l'Empress of Ireland», raconte M. Saint-Pierre, déjà auteur de «L'Empress of Ireland : une histoire par l'image», paru en 2016.

L'Empress of Ireland était un paquebot transatlantique long de 170 mètres qui faisait la liaison entre le Canada et le Royaume-Uni. Il est entré en collision avec un bateau norvégien sur le fleuve Saint-Laurent, le 29 mai 1914. Quatorze minutes ont suffi pour qu'il coule. Le naufrage a coûté la vie à 1012 de ses 1477 passagers.

M. Saint-Pierre, qui a grandi à Rimouski, dit que l'identification des photos a été facile. Le seul moment où des soldats britanniques ont été vus dans la région, c'est au moment du naufrage. Autre indice: les grandes bouées qui servaient à marquer l'emplacement d'un naufrage.

Mais le travail d'historien de M. Saint-Pierre ne faisait que commencer. Il a remarqué que les photographies semblaient provenir d'un album.

Il est parvenu à retrouver le vendeur, un homme du Tennessee. Il a accepté d'acheter tout l'album qui comprenant des centaines de vieilles photos montrant des scènes maritimes. Plusieurs dizaines d'entre elles montraient l'Empress of Ireland, dont une rare photo d'un cadavre en train d'être retiré de l'eau.

M. Saint-Pierre refuse de préciser le prix qu'il a dû payer pour l'album. C'était «cher» pour un lui. Toutefois, l'importance historique de l'album justifiait la dépense. Après une longue attente, il a reçu l'album qui contenait plus de 500 photos, dont 56 reliées à l'Empress of Ireland. Certaines avaient été vendues comme cartes postales, «mais la grande majorité n'avait jamais été publiée».

Depuis qu'il a reçu l'album à la fin de 2021, M. Saint-Pierre a passé beaucoup de temps à en examiner le contenu. Les photographies lui ont révélé plusieurs choses qu'il ne connaissait pas sur les opérations de renflouement, notamment le nom de plusieurs des hommes qui y ont participé.

Elles l'ont aussi aidé à en apprendre plus sur l'aspect technique de l'opération, notamment l'installation d'une chambre de décompression sur un bateau de plongée, ce qui était une première à l'époque.

Autre surprise: Ralph Stratton Blydenburgh, l'ancien directeur du Yankee Salvage Association of New York, n'était pas seulement le premier propriétaire de l'album. C'était aussi l'homme que l'on peut voir avec des lingots d'or récupérés du bateau sur une photographie grandement publiée.

M. Saint-Pierre dit que les photos seront reproduites dans le nouveau livre qu'il est en train de rédiger sur les opérations de renflouement. Toutefois, il a l'intention de les remettre ensuite à un musée maritime.

Il espère que l'album pourra permettre de faire un peu plus la lumière sur un désastre qui demeure relativement méconnu encore de nos jours.

«Ça rend cette histoire fascinante quand on commence à s'y intéresser. Pourquoi 1012 personnes qui meurent près de chez nous, on les oublie si facilement? Bien sûr, il y a la Première Guerre mondiale [en juillet 1914], mais cela n'explique pas tout.»

M. Saint-Pierre mentionne que l'Empress of Ireland a fait l'objet de beaucoup moins de recherches qu'un autre naufrage mieux connu, le Titatic.

Quant à l'album, il démontre «qu'il y a encore beaucoup de choses à apprendre».

Morgan Lowrie, La Presse Canadienne