COP30: des promoteurs de gaz font partie de la délégation du Canada

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Par La Presse Canadienne, 2025
MONTRÉAL — Des participants à la COP30 sur le climat, qui s'est amorcé lundi à Belém, au Brésil, dénoncent la présence de membres de l’industrie pétrolière et gazière dans la délégation canadienne.
Une dizaine de représentants de l’industrie pétrolière et gazière, qui est responsable en grande partie de la crise climatique, sont sur la liste de la délégation canadienne à la COP30.
«Ça démontre à quel point ce gouvernement-là est de connivence avec l'industrie pétrolière», a indiqué le député bloquiste Patrick Bonin, qui fait partie de la délégation du Canada, et qui a partagé la liste de ceux qui y figurent avec La Presse Canadienne.
Dans cette délégation, dirigée par la ministre de l'Environnement et du Changement climatique, Julie Drasbusin, on retrouve notamment Jay Averill, directeur des communications de l'Association canadienne des producteurs de pétrole (ACPP), dont les membres produisent 80 % du gaz naturel et du pétrole du Canada.
«Dans le passé, les membres de cette industrie ont fait des campagnes pour remettre en question la science climatique, ils font de l’obstruction dans les négociations climatiques et dénigrent l'ampleur des changements climatiques», a réagi le député bloquiste, en ajoutant que «les gens qui ne veulent pas participer à la solution ne devraient pas faire partie de la délégation».
Accès privilégié
C’est la septième COP à laquelle Patrick Bonin participe, mais c’est sa première participation en tant qu’élu.
Comme les autres «membres de la délégation officielle», il a accès aux breffages quotidiens de la négociatrice en cheffe du pays, Jeanne-Marie Huddleston, «qui nous informe des positions du Canada».
Faire partie de la délégation d’un pays permet également d'accéder à certaines salles où ont lieu des négociations qui sont «interdites aux participants réguliers».
Par conséquent, «ça donne une capacité d’influence beaucoup plus grande que les participants réguliers».
L’industrie pétrolière et gazière est le «plus gros lobby au Canada», alors «c’est comme inviter le renard dans le poulailler», a illustré Patrick Bonin.
Pour Sabaa Khan, de la Fondation David Suzuki, «c’est l’équivalent de permettre à l’industrie du tabac de participer aux discussions mondiales sur la santé publique sous l’égide de l’OMS».
La Fondation David Suzuki a envoyé des représentants à la COP30 à Belém, mais ceux-ci ne font pas partie de la délégation canadienne.
«À un moment où le mouvement mondial réclame des États qu’ils s’attaquent aux conflits d’intérêts et à la capture des négociations climatiques par les grandes entreprises fossiles, le Canada fait exactement le contraire - il ouvre la porte à ceux qui sont à l’origine de la crise», a ajouté Mme Khan.
Bombe carbone
Scott Volk et Tim Shaw, deux dirigeants de Tourmaline Oil Corp, font partie de la liste de la délégation canadienne.
Tourmaline Oil Corp est notamment impliqué dans le projet pétrolier et gazier Montney Play, qui a récemment été identifié comme étant la plus grosse «bombe carbone» au Canada par les organisations Lingo, Data for Good, Reclaim Finance et Eclaircies.
L’expression «bombe carbone» a été définie dans une étude de la revue Energy Policy en 2022 et fait référence à un projet qui générera plus d’un milliard de tonnes de GES s’il est mené à terme.
Le Canada compterait 14 bombes carbone sur son territoire et Tourmaline Oil Corp est impliqué dans deux de ces projets.
Quatre membres d’Energy for a Secure Future, une organisation vouée à la promotion de l’exportation du gaz naturel canadien, font également partie de la délégation canadienne.
La délégation canadienne compte environ 240 noms, parmi lesquels figurent la ministre Drasbusin, le ministre Steven Guilbeault, quelques sénateurs et députés, des représentants des provinces et de certaines villes, des dizaines de fonctionnaires, plusieurs représentants des Premières Nations, des représentants syndicaux, des membres d’organisations vouées à la protection de l’environnement, des représentants de l'industrie de la capture et de la séquestration du carbone, des professeurs d’université, des représentants de grandes industries et des acteurs du monde financier, notamment.
La Presse Canadienne a tenté d’obtenir un commentaire du bureau de la ministre de l’Environnement et cheffe de la délégation canadienne, Julie Drasbusin, concernant la présence de représentants des industries fossiles au sein de la délégation canadienne, mais n’avait pas obtenu de réponse au moment d’écrire ces lignes.
Stéphane Blais, La Presse Canadienne